« The Dark Knight Rises » ne vaut pas « The Dark Knight ».
« Bane n’est pas le Joker. »
« Le scénario ne tient pas debout, les twists sont tous pourris. »
Voilà un petit florilège de ce que l’on peut trouver sur la toile.

Pour commencer, il faudrait arrêter de comparer les deux films. En effet, Bane n’est pas le Joker, et pour cause, c’est le seul, dans le comic, à avoir mis à terre la chauve-souris. Il semblait alors normal que ce soit lui qui clôt la saga. Nolan avait mis la barre très haute avec « The Dark Knight » et son Joker névrosé. Encore une fois, rien de surprenant. Le Joker est l’ennemi le plus connu du célèbre justicier. C’est donc normal que son film soit au-dessus des deux autres. Mais le débat n’est pas là. Du moins, les débats. Ceci étant dit, intéressons maintenant au film.

Dans un premier temps, c’est le scénario qui semble poser problème. Trop de twists, de sous intrigues paraît-il. Pas du tout. Le scénario est avant tout d’une richesse extraordinaire et d’une délicieuse subtilité, et c’est en cela qu’il pose problème, trop complexe à la première vision. Un exemple : lorsque le prisonnier raconte à Wayne comment s’est échappé l’enfant ; à aucun moment, il ne fait allusion à Bane, à aucun moment, il ne dit son nom. C’est Bruce qui se raconte sa propre histoire (et nous avec) et qui veut voir Bane escalader le mur.
Dans les soi-disant incohérences du scénario, nous avons aussi :
Comment Bruce Wayne est-il revenu à Gotham ? Comment a-t-il pu rentrer dans la ville ?
En quoi c’est un problème ? La logique veut qu’il revienne point barre. Peu importe comment.
Il y a certes des imperfections et des incohérences, mais quel film n’en a pas. Bref, passons sur ces « incohérences » scénaristiques.

Le film est long, plein de rebondissements mais Nolan a justement besoin de ce temps-là pour poser correctement son intrigue. Toutes les péripéties du film sont justifiés car elles ont plusieurs buts bien précis : la chute de Bruce Wayne puis la mort du justicier masqué. Dans la première partie du film, Wayne est un homme estropié et sur le déclin. Le départ de son plus fidèle serviteur, Alfred, ainsi que l’effondrement de son empire financier viendront fragiliser encore plus le milliardaire. Et cela arrive au plus mauvais moment du film : l’affrontement avec Bane. Si Wayne est affaibli, aussi bien psychologiquement que physiquement (cela fait quand même 8 ans qu’il n’entretient plus son corps), alors le justicier masqué l’est aussi. De plus, ce dernier est pourchassé par les forces de l’ordre et un officier de police ira jusqu’à tirer sur son arme. L’un comme l’autre, ils sont seuls.

L’affrontement avec Bane est certainement la meilleure scène du film. L’éclairage est parfait et les cadrages (contre-plongée) sont parfaitement maitrisés pour montrer, à chaque plan, l’ascendant de Bane sur son adversaire. Le combat a lieu sous terre, dans les égouts. Wayne est tombé au plus profond des ténèbres et l’apothéose n’est plus très loin : Bane brisant le corps de l’homme chauve-souris tel une brindille et balançant son corps à terre comme un vulgaire morceau de bidoche. Quelle splendide et grandiose apothéose. Mais cette descente aux enfers est un mal nécessaire pour Bruce Wayne car s’il veut pouvoir rivaliser avec Bane dans la seconde partie alors il doit d’abord devenir son égal. Et seulement ensuite, il pourra le vaincre. Il doit « s’élever », comme l’indique le titre, et cela commence par sortir de la prison qui se trouve au fond d’une fosse.
Au passage, la prestation de Tom Hardy, méconnaissable derrière son masque, apporte le charisme nécessaire au personnage de Bane. Le travail sur sa voix est remarquable, fluctuant par moments entre des sons graves et aigus, suscitant alors encore plus de terreur. La crainte de ce personnage est tout autant visuel que sonore et la séquence d’ouverture nous le montre bien. Excellent travail sonore autour de ce personnage et belle performance d’acteur.

Une autre performance d’acteur est à souligner, celle d’Anne Hathaway en sublime Selina Kyle. Et seulement Selina Kyle. Le personnage de Catwoman n’existe pas dans « The Dark Knight Rises ». Le nom n’est jamais cité, elle ne porte pas de griffes aux doigts, elle n’a pas de fouet et son costume ne ressemble en rien au costume de Catwoman. C’est une simple voleuse. Aucune comparaison n’est possible avec la Selina Kyle de Burton. Le jeu d’Hathaway se situe à la frontière de ses émotions. À tout moment, elle peut basculer d’un état à un autre puis revenir aussi rapidement au premier état. Une jolie découverte, au sens propre comme au sens figuré.

Mais malgré tout cela, c’est la déception qui reste à la fin du film. La déception de voir une actrice gâchait un film à ce point. Marion Cotillard est pitoyable, joue avec le QI d’une huître et n’a aucun charisme en tant que fille de Ra’s al Ghul. C’est quand même la seule, avec Wayne, à avoir pu sortir de la prison souterraine (dans le film en tout cas), et malgré cela, aucune émotion ne transpire de son visage, même dans sa mort. Une mort grotesque et pathétique. On peut reprocher une mauvaise direction d’acteur à Nolan concernant le personnage de Cotillard mais l’actrice doit aussi être dans la proposition de jeu. On a l’impression qu’elle vient sur le tournage, joue ses scènes et repart chez elle. Elle fait juste le boulot or, pour un film comme celui-ci et pour un rôle comme celui-ci, il faut savoir « élever », une nouvelle fois, son niveau de jeu. Elle fait vraiment tâche au milieu des Bale, Hardy, Hathaway, Oldman et autre Caine. Ces deux derniers sont d’ailleurs vraiment performants dans leurs rôles respectifs du commissaire Gordon et d’Alfred.
De la déception donc car sans cette erreur de casting, le film aurait pu obtenir le rang de chef d’œuvre.
Pour terminer, le public attendait certainement la mort du chevalier noir mais il faut rappeler que les héros, les super-héros, les justiciers masqués ne meurent jamais, comme le prouve la fin du film, avec la construction d’une statue à l’effigie du chevalier noir.
JulienGauthier
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le 20 févr. 2013

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