Un crime au Paradis par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Jojo et Lulu Braconnier habitent une ferme, "Le Paradis", située dans un bourg de Province où ils mènent une vie conjugale très mouvementée. Jojo est un petit cultivateur un peu simple et tranquille qui a épousé Lulu, une atroce marâtre soûlarde, agressive et vulgaire. Bien entendu les tracasseries de ce couple sont bien connues dans le village et lorsque les propos entre les deux conjoints deviennent insupportables pour Jojo, celui-ci aime aller se réfugier auprès de son ancienne maîtresse d'école et lui demander conseil. Il faut dire que cette terrible Lulu fait preuve d'une imagination débordante afin "d'agresser" son mari. Elle lui troue son seau à lait, crève ses pneus de voiture, met une quantité de sel effroyable dans sa soupe en lui faisant croire qu'elle a pissé dans l'assiette, sans parler de la collection de timbres du pauvre bougre qui finit dans le poêle. Un soir, en regardant la télé, Jojo assiste à l'interview de Maître Jacquard, un avocat célèbre, champion des acquittements en Cours d'assises. Le mari bafoué rend visite au magistrat et s'accuse d'avoir tué sa femme. Aussitôt l'avocat prend de l'intérêt pour ce crime, discute avec Jojo de sa plaidoirie et lui donne tous les conseils possibles pour obtenir les circonstances atténuantes. Le soir même, une dispute de plus oppose le couple et Jojo tue, en ayant pris soin de suivre les conseils de l'avocat, son épouse qui justement voulait l'empoisonner. Jojo est arrêté et le procès a lieu avec l'espoir pour le meurtrier d'obtenir, au moins, les circonstances atténuantes si ce n'est l'acquittement...


Il n'y a pas homme plus paisible que Jojo Braconnier et tout irait dans le meilleurs des mondes s'il n'avait pas été marié un peu malgré lui à sa copine d'enfance Lulu, la fille des patrons de la ferme dans laquelle ils habitent toujours. Lulu, la propriétaire des lieux, est une ivrogne et voue une haine féroce envers son époux qu'elle martyrise. Pour sa défense, cette femme a perdu sa soeur jumelle et, traumatisée depuis ce jour, n'a jamais pu se remettre vraiment de ce drame. L'état de Lulu n'inspire pas non plus Jojo à effectuer de temps à autres son devoir conjugal. Il devient donc le souffre douleur de son épouse et tous les gens du village compatissent à la situation délicate de leur copain. Ses refuges, ses havres de paix sont sa vieille maîtresse d'école, une femme à la grande sagesse, pleine de bon sens et de compassion. Auprès d'elle Jojo se sent en sécurité et il peut confier sans crainte ses déboires conjugaux. C'est aussi sa collection de timbres sur lesquels en posant son regard il s'évade vers des horizons merveilleux. Pendant ce temps, Lulu complètement avinée, s'endort sur le bord de la table devant son verre de vin. Malgré tout pour notre pauvre agriculteur le hasard fera bien les choses car il va se servir des conseils involontaires d'un avocat pour commettre un meurtre sans craindre une lourde peine. C'est ainsi qu'à la suite de la disparition de sa collection de timbres, partie en fumée dans le poêle, Jojo va commettre l'irréparable en tuant Lulu qui avait décidé le même soir de l'empoisonner. Il n'a plus qu'à se constituer prisonnier. Le meurtrier a suivi les instructions de Maître Jacquard sauf que celui-ci ne savait pas que lors de la visite de Jojo à son cabinet le drame ne s'était pas déjà produit. Jojo va être la vedette d'un procès au cours duquel Maître Jacquard aura la tâche facilitée par les témoignages des gens du village. Lulu et Jojo auront donc payé très cher leur mariage forcé. Lulu n'aura jamais supporté la mort de sa soeur jumelle et Jojo en aura subi les conséquences jusqu'à ce jour fatidique. Le drame pour eux était aussi qu'avec la ferme ils ne pouvaient que rester mariés pour la vie...


Jean Becker affectionne les sujets dont l'action se déroule dans les endroits ruraux bien loin des grandes villes. Deux ans après avoir connu le succès avec "Les enfants du marais", il réalise ce drame de la terre avec une partie des acteurs dont Jacques Villeret et André Dussollier qui s'étaient montrés très convaincants dans le précédent film. Cette oeuvre est le remake de "La poison", le célèbre film de Sacha Guitry sorti en 1951 dans lequel excellaient Michel Simon et Germaine Reuver. A la vue de la réalisation de Jean Becker, on reste un peu sur notre faim car ce film manque, pardon pour la soupe au potiron de Lulu, d'un peu de sel. Le problème est que Jacques Villeret fait du Villeret, il se contente de jouer son personnage habituel et de ce fait notre Jojo manque cruellement d'originalité. Par contre Josiane Balasko nous surprend agréablement dans ce rôle de pocharde aussi révoltante qu'émouvante lorsqu'elle rêve à son beau kiné. C'est lors de ses apparitions que le film décolle un peu. André Dussollier, comme son camarade, se retrouve dans son registre habituel et n'apporte rien de plus. Toutefois, j'ai une certaine tendresse pour l'immense actrice qu'était Suzanne Flon. Dans son rôle de maîtresse, elle interprète son personnage avec une grande sobriété, une grande distinction et beaucoup de tendresse. Le film par lui même est honnêtement réalisé même si la séquence du tribunal n'est pas toujours convaincante.


C'est donc un film "honnête" et sans génie qui nous a été offert par Jean Becker. Par contre, si cette histoire vous séduit, n'oubliez surtout pas de regarder le film de Sacha Guitry avec un Michel Simon insurpassable.

Grard-Rocher
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le 12 nov. 2014

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