Robert Rodriguez avait tenté avec son Machete de s'attaquer aux divers problèmes sociaux que sont l'immigration et l'extrême patriotisme, mais s'était un peu planté la gueule, étant donné que ce sujet délicat ne collait pas du tout à l'image Grindhouse qu'était censé véhiculer son film.
Chris Peckover, qui réalise et écrit ici son premier long-métrage, se penche à son tour sur la question, nous lâchant au beau milieu d'un thriller violent, glauque, malsain, et particulièrement stressant.
Un groupe de cinéastes tournent un reportage sur l'immigration illégale en provenance du Mexique, mais, se retrouvant capturés, seront obligés d'en tourner un sur des « patriotes » qui séquestrent les resquilleurs, estimant que le gouvernement ne fait pas son travail, et que les immigrés sont des êtres indésirables. Voilà en gros l'histoire, mais surtout le sujet du débat, car c'est ce que c'est, un débat sur l'hypocrisie Américaine et ses lois contre l'immigration. Dans un certain sens, ça rejoint l'esprit de Red State, sauf qu'ici ça n'est pas le fanatisme religieux qui est condamné, mais le fanatisme patriotique. Pour le reste on retrouve les mêmes ingrédients, que ce soit les discours aberrants, ainsi que les incessantes humiliations, qui rappellent quant à elles le récent The Woman. Néanmoins Peckover n'y va pas avec le dos de la cuillère, et dirige l'ensemble de main de maître afin de faire ressentir au spectateur une angoisse constante. Malin dans sa façon de réaliser, il tourne un film dans lequel est tourné est film, et se permet donc d'user du style DV quand il le souhaite, toujours aux moments opportuns, ce qui est bien plus efficace qu'un Blair Witch où l'effet était déjà tué au bout des premières vingt minutes. La violence est quant à elle gérée de la même manière, pas de torture-porn dans le sens moderne du terme, mais bel et bien des scènes de tortures, dans lesquelles on ne voit finalement pas grand chose, mais où les coups sont portés et partiellement cadrés afin que le spectateur soit davantage choqué par ce qu'il ne voit pas que par ce qu'il voit. Cependant Peckover sait quand il peut se permettre de nous montrer ce qu'il se passe, car même si l'on est plus dans un thriller que dans un film d'horreur, il faut en montrer un minimum afin que le spectateur n'ait pas l'impression que cette façon de filmer soit un simple cache-misère.

Bref, Undocumented vient dignement se placer aux côtés de Red State, et fait figure d'exemple en la matière. Une fois la bobine lancée on reste scotché à son écran, jusqu'à la fin, et le générique, cette fois-ci constitué d'images réelles, vient enfoncer le fond dramatique qu'est la vie que doivent subir ces immigrés.
Point fort et aussi point faible, sa violence et sa crédibilité en feront un produit qui créera autant d'admirateurs que de détracteurs. Qui plus est, Peckover, en plus de son talent, a été épaulé par une technique à la hauteur, ce qui en ajoute à l'ensemble. Néanmoins il n'est pas Kevin Smith, et à moins d'un miracle, il y a peu de chances que cette production fasse parler d'elle, bien qu'elle ait eu le droit à de nombreuses réactions positives dans les différents festivals où elle a été présentée. Wait and see...
Pour conclure, les amateurs de thrillers riches en sensations et disposant d'un fond et d'une forme travaillés succomberont sans nul doute à cette production hors-normes. A l'inverse, ceux qui n'ont pas les nerfs solides et ont du mal à supporter tension et brutalité risquent d'avoir du mal à y trouver un quelconque intérêt.
Mention spéciale pour Chris Peckover, qui fait avec ce long-métrage une entrée fracassante. IFC Films vient d'acquérir les droits d'exploitation, ce qui ne le limitera plus aux projections en festivals, et espérons donc qu'il rencontre toute l'attention qu'il mérite.
SlashersHouse
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le 4 oct. 2011

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