Jazzy nazi

Whiplash, c'est un duel, une relation sado-masochiste consentie par les deux parties. Un élève batteur qui sue sang et eau pour prétendre au firmament du panthéon des batteurs de jazz d'une part, un professeur fascisant, tête rasée, tout de noir vêtu, déversant des chapelets d'insultes (à forte tendance homophobe) sur ses opprimés protégés d'autre part.

Leur affrontement, chacun en quête d'une perfection obsessionnelle, est aussi amorale que passionnante à suivre. Pas tant dans quelques nœuds scénaristiques faciles (un pneu qui crève, c'est toujours commode), plutôt dans l'intensité de cette lutte qui ne se révèle qu'un long sillon de souffrance et de rage, pour mieux semer les germes d'un orgasme final mutuel après une énième entourloupe. Whiplash interroge violemment le spectateur sur les limites & objectifs que lui même s’attribuerait. Le calvaire d'Andrew peut du coup être vécu comme un encouragement ou une source de démotivation.

La réalisation de Damien Chazelle accompagne parfaitement son sujet, rythmée, jouant des tons mordorés et boisés, aérée dans gros plans, dense dans ses perspectives.

Finalement, le vrai bémol que je trouve à Whiplash, c'est la musique. Jamais je jazz ne m'a été dépeint aussi tristement, méthodiquement, sans la moindre étincelle capable de sublimer les partitions jouées. L'orchestre à l'écran est ici un troupeau de moutons terrifiés qui bêle sa partition mécaniquement. Bref, pas le jazz que j'apprécie.