Fincher l'illusioniste et son pendule qu'il agite devant nos yeux béants et un peu humides...
Toujours classieux, jamais gratuit.
L'effet spécial tellement spécial qu'il en devient invisible.


La pulsation hypnotique de son Zodiac, cette vague de manières millimétrées, cette mise en abîme d'une Amérique qui enfante ses propres démons.
La reconstitution d'une époque au détail qui tue près.
Les années 60, terminées. Un sanglant point final qui se pose en 69. L'insouciante ferveur, son aveugle joie de vivre, les samedis au drive-in à peloter la voisine: terminées.
Elles passent et se fracassent, place au mood glacial des 70's, à son électricité, à son nuage de cendres aux relents de patchouli.
Il y a un monde nouveau derrière la porte et lorsqu'elle s'ouvre, elle révèle son cerbère sidéral : le Zodiac.


Le monstre sort de l'ornière et l'Amérique reste l'Amérique : s'il fait vendre du papier, ils en feront une légende.
La terreur nappe le quotidien, pour préparer ce siècle qui arrive et son nouveau mode de vie, avec la boule au ventre.
Les oreilles grandes ouvertes, les yeux qui accrochent pour scruter dans une ombre, un reflet, l'évidence : enfin mettre un visage sur la menace, cette pute qui, avant, n'hésitait pas à rouler du cul pour qu'on la remarque. Aujourd'hui , elle est devenue invisible. Elle porte un masque et ça pourrait être n'importe qui.


Un point f(l)ou sur l'horizon , une dernière perspective et enchainer les nuits blanches. Avancer, reculer, s'écraser d'illusions, celles qui précipitent les chutes. Assister, impuissant, les bras ballants d'admiration, à la naissance d'un nouvel Homme.
Faire le puzzle, les casses-têtes, les codes, échafauder nos propres prisons.
La mécanique implacable de l'obsession, le grain de sable dans la machine, celui qui chatouille, agace, irrite puis délite tout ce qu'il touche.
De grain devenir forteresse, un château aux tours acérées où pendent oriflammes et cadavres putréfiés offerts en sacrifice.
Faire rouler la vie sur la pulpe de nos doigts et d'une pichenette, l'envoyer bouler.
Être l'unique et frapper au hasard, ne rien laisser d'autre que quelques miettes pour qu'ils puissent se repaître.
Témoigner de l'opportunisme insolent du prédateur insatiable, ce fantôme insaisissable qui prend confiance en lui à mesure que leurs peurs s'emmêlent .


Fincher opère sa mutation et réalise le deuxième chef d'oeuvre des films de serial killers, après Se7en.

DjeeVanCleef
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le 26 juin 2016

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