Le clivage entre challenge et difficulté.

Avant toute chose (et pour donner de bons arguments aux détracteurs), je tiens à jouer franc-jeu : je n'ai pas terminé ce Dark Souls. Après 32 heures de jeu et un personnage niveau 53, je sature, j'en ai un peu marre, et je ne pense pas relancer le jeu de si tôt. Explications.

Tout ceux qui connaissent un peu le monde du jeu vidéo le savent : Dark Souls est un jeu qu'il est bon de faire pour s'affirmer gros joueur, tant la difficulté est mise en avant par les testeurs et même par les développeurs eux-mêmes. Autant en parler tout de suite, vu que c'est l'argument principal : oui c'est dur. Oui vous allez mourir. Oui le challenge est relevé. Mais peut-être pas pour les bonnes raisons. Dans Dark Souls, vous ne serez jamais récompensé. Vaincre une difficulté vous permet simplement de passer au défi suivant, encore plus dur, encore plus frustrant, et sur lequel vous allez probablement encore plus buter. Peut-être que je suis un casual gamer, mais franchement, au bout d'un moment, ça gave. Je pense qu'un joueur a de temps en temps envie d'être récompensé, ne fus-ce que par une jolie cinématique ou par un moment de répit. Quel intérêt de passer trois heures sur un passage quand on sait que de toute façon la seule récompense sera d'atteindre un autre encore plus énervant ?

Là où le bât blesse, c'est que ce n'est même pas franchement de la difficulté intelligente. Dans un Dragon Age Origins par exemple, il s'agit d'exigence. Si tu fais n'importe quoi, tu le payeras cher. Mais ici, c'est purement et simplement de la méchanceté gratuite. Les ennemis peuvent vous enlever votre barre de vie en une frappe, un boss bien lourd à atteindre peut vous jeter dans le vide d'une simple choppe, les couloirs étriqués peuvent empêcher la caméra de gérer les collisions ... Effectivement, je le redis, on meurt énormément, et moi probablement plus que la moyenne, mais franchement perdre quatre heures de temps sur un truc bidon quand on a plus beaucoup le temps de jouer, quel intérêt ?

Alors oui, il ne faut pas évoquer uniquement cet aspect, le soft a malgré tout d'autres éléments à montrer, et notamment les graphismes plutôt sympathiques et d'une ambiance sombre efficace, même si certaines textures sont bien baveuses. Le gameplay pseudo-réaliste et lourd est également bien pensé, et ça fonctionne, les erreurs viennent réellement du joueur, même si parfois le jeu choisit de prendre en compte ou non si l'on appuie sur une touche pendant une animation pour préparer l'action suivante, ce qui peut causer la mort quand il prend en compte une erreur d'appréciation.

A côté de ça, le scénario est, lui, carrément en retrait, ce qui m'a beaucoup refroidit et ce qui accompagne ce sentiment qui m'habite, celui de se dire "mais pourquoi perdre son temps sur ce jeu ?". Certes, le background est plutôt soigné, mais un bon background n'est que la pierre sur laquelle poser une bonne histoire. Ici, j'ai l'impression que cette dernière étape a été laissée de côté. A noter également que les dialogues ont été enregistrés dans de très mauvaises conditions, c'est très curieux d'entendre des voix de si mauvaise qualité. Dommage, mais pas franchement hyper important.

Mais finalement, pourquoi cette note ? Pourquoi expliquer tout ce qui ne va pas si c'est pour donner un joli 7 ? Tout simplement parce que l'espace d'un instant, l'espace d'une petite dizaine d'heures, j'ai vu la lumière au bout du tunnel. J'ai ressenti ce que ressentent ces milliers de fanboys. Je suis rentré dans le trip, j'ai vécu un espèce d'orgasme vidéoludique, j'ai pris du plaisir à mourir et à recommencer encore et encore, j'ai appris à maîtriser le gameplay, à m'améliorer. Pourquoi cela n'a-t-il duré que ce laps de temps ? Pourquoi n'ai-je pas pu faire toute l"aventure ainsi ? Je pense que c'est parce que la difficulté aberrante finit par gonfler, et que la durée de vie artificielle qu'elle amène énerve. J'ai probablement trouvé le challenge parfait pour mon niveau durant cette dizaine d'heures, et malheureusement, le fait d'augmenter le niveau m'aura enlevé ce plaisir.

Je suis venu, j'ai vu, j'ai perdu. J'ai laissé tomber, tu as gagné jeu, tu m'as eu. Mais ne crie pas victoire trop vite, j'ai vu de bien meilleures difficultés que toi, et si j'arrête, c'est parce que j'ai d'autres jeux à faire, des jeux avec un challenge mieux construit et une histoire qui donne envie de voir la suite. Alors oui, tu peux te moquer de moi, me montrer du doigt, mais finalement, je crois que dans l'histoire c'est moi le gagnant. Pourquoi me dis-tu ? Parce que je n'aurais pas perdu une centaine d'heures sur toi.