Je précise n’avoir joué, lors de l’écriture de ce texte, qu’à ce Dark Souls 1 (et vaguement au 2, qu’il faudra que je fasse à tout prix). Donc si des idées et concepts proviennent de Demon Souls (le précédent titre du studio, ou d'ailleurs), les découvrant avec sa suite spirituelle je les assimile à celle-ci.


Tout d'abord un grand merci (big bisou) au moddeur derrière le fameux DSFix. Le jeu profite ainsi d'un bilan technique digne de sa monture (astuce pour éviter le tearing à 60 fps : mettre le jeu en window mode dans les options du jeu et activer le borderless dans les options de DSFix). Malheureux que le jeu ne permette pas par défaut d'atteindre ce niveau visuel dans ses options, et qu'il faille un peu bidouiller à l'aide d'un patch amateur. Bref, sur PC, jouez y avec ce patch ou n'y jouez pas.


Restons sur le plan visuel. A défaut de posséder des textures et détails fabuleux (c'est même parfois presque hideux), DS nous offre à de nombreuses reprises des panoramas plus qu'inspirés permettant au joueur de souffler et de garder espoir avant de retourner affronter d'immondes créatures dans les dédales de ce lugubre univers.


Il faut dire que ce dernier, rappelant un moyen âge occidental gothique, est particulièrement généreux. Des ennemis tantôt génériques, tantôt magnifiquement ignobles (notamment les boss, sublimes), mais toujours dangereux, le bestiaire saura nous hanter. Des châteaux enneigés, aux cavernes volcaniques, les environnements, très typés, délimitent les diverses zones à parcourir. Les adversaires étant spécifiques à chacune d'elles, l'exploration d'une nouvelle aire est quelque peu terrifiante. Les sentiments ressentis sont presque palpables. D'autant qu'ils sont exacerbés par l'ambiance oppressante, lancinante voire déprimante du titre de From Software, notamment grâce à la bande son, se contentant majoritairement d'un souffle inquiétant. En pleine confiance sur les niveaux déjà parcourues en long en large et en travers, le trouillomètre repart à la hausse grâce à une vue souvent limitée (le jeu fourmille d'endroits très "dark") face à des dangers inédits surgissant au détour de chaque couloir. Pas de carte, ni de chemin balisé artificiellement, on avance à tâtons, retenant notre respiration, et mémorisant chaque lieu pour se rappeler les dangers et ainsi faciliter le parcours au prochain passage.


Car si on parcourt certaines zones à de nombreuses reprises, et qu'on ne se perd presque jamais, c'est avant tout grâce à un level design aux petits oignons. On peut voir l'ensemble comme une sorte de gros cube (je rêve d'ailleurs de voir une reconstitution sur une map du monde de ce jeu, si jamais vous savez si cela existe, n'hésitez pas à commenter). Cube subdivisé en multiples parties entremêlées, dans lesquelles la progression se fait assez librement (une zone est trop difficile ? explorons en une autre). A l'instar d'autres célèbres types de jeux, on débloque au fur et à mesure des raccourcis qui parfois surprennent, par le naturel de l'imbrication, autant qu'ils soulagent. Ils sont bien souvent comme une bénédiction, une récompense ultime pour avoir réussi à braver moult risques qu'on peut désormais éviter. Outre la grande diversité des environnements, exploitant beaucoup la verticalité, l'exploration est appuyée par cette dimension "cubique". Un décor se présente devant vous au loin et semble inaccessible ? De grande chance qu'il fera partie de la suite de l'aventure. C'est tout simplement brillant. Non content de créer une certaine cohérence, et d'être face à un monde presque organique (il fallait bien que je cale ce mot), ça participe de manière subtile à l'histoire que s'écrit le joueur. Et bien que le jeu puisse se faire de bout en bout en évitant de nombreuses zones (et une majorité de boss !), le joueur que je suis n'a eu de cesse l'envie de découvrir la moindre parcelle de terrain devant tant d'ingéniosité et ce malgré la mort nous attendant à chaque recoin. Car si le jeu est dans l'ensemble plutôt difficile (par rapport à la production actuelle), et qu’il a battit sa réputation là dessus, chaque victoire est suivie d'une très grande satisfaction et de récompenses méritées. Sans jamais être injuste, malgré quelques faiblesses de jouabilités (caméra, contrôle et hit box pas toujours parfaits), il permet toujours de trouver une solution à travers une faille (voire un « exploit » ?) à condition d’observer et de faire preuve de patience et parfois de persévérance.


Mais on ne rencontre pas seulement des êtres souhaitant notre mort. Une petite ribambelle de personnages viennent peupler le royaume de Lordran. Mystérieux, déprimé, drôle, ou simplement utile, ils ont souvent leur petite personnalité plus ou moins marquante, mais sans jamais être trop bavards. D'ailleurs le jeu en général ne l'est pas beaucoup. Chaque objet ou dialogue nous lâche de manière parcellaire des informations sur le monde, révélant ainsi une certaine richesse. Cela reste malgré tout assez cryptique et est loin d'être étouffant. Ce n'est qu'une petite brique de l'ambiance du jeu. On peut passer à côté sans beaucoup perdre en intérêt.


Une autre bénédiction qu'on croise dans Dark Souls, les feux de camp. Élément central du gameplay, ils sont la lueur dans l'obscurité tout autant que le renouvellement du danger. On meurt dans ce jeu, beaucoup, malgré le fait d'être déjà mort. Mais on ne perd jamais. Pas de gameover et d'un retour à la dernière sauvegarde. Lorsqu'on trépasse, on réapparaît au dernier feu de camp utilisé, sans rien n'avoir perdu de ce qui a été amassé auparavant. Sauf les âmes, autre élément central, récoltées sur les cadavres des monstres. En effet, celles ci, faisant office tout autant d'expérience que de monnaie d'achat, restent à l'emplacement de la dernière mort, où elles peuvent être récupérées… à moins de mourir à nouveau entre temps, auquel cas elles disparaissent à tout jamais. Et ceci est une autre idée géniale de From Software. Tout comme le fait de se reposer auprès d'un feu qui permet de se soigner et de faire progresser son avatar, mais qui en même temps fait respawner tous les ennemis du jeu (hors boss et quelques créatures uniques). Difficile dilemme par moment de les utiliser.


Et l’équipe de conception ne s’est pas arrêté là quant aux bonnes idées. Surtout, si possible, jouez y connecté aux Internets. Sans quoi vous perdrez une part de la magie de l’ambiance de Dark Souls. Car s’il s’agit avant tout d’une aventure solo, elle se découvre aussi grâce aux autres joueurs. Le titre propose, après l’achat d’un item chez un des marchands, un outil de communication asynchrone. Laissez un message n’importe où, à l’aide d’un catalogue imposé de mots et phrases, et les autres joueurs parcourant la zone pourront le lire. Aidez-les en indiquant un secret ou piégez-les avec un mensonge, libre à vous. On se sent de suite beaucoup moins seul dans ce sinistre monde. C’est parfaitement intégré à l’univers, sans être une simple couche de dialogue par-dessus le jeu. Ajoutons la possibilité à travers certains autres items, et sous conditions (parfois un peu obscures), de pénétrer dans la partie d’un autre joueur pour l’aider ou au contraire le terrasser (et inversement être envahi ou appeler à l’aide pour se faire aider), et on obtient une couche multijoueur singulière mais jouissive.


Parmi les quelques écueils, en plus de ceux déjà cités à propos de la jouabilité ou des graphismes, je n’ai pas très apprécié l’équilibrage avec certaines armes. Mais le jeu n’étant pas toujours très avare en détails (volontairement), j'ai très possiblement manqué quelque chose. J’ai tenté un personnage très fort en magie. Parce que la magie c’est classe, mais aussi pour profiter de bonus en améliorant les armes de certaines façons (enchantées, divines). Pour finalement terminer le jeu avec des armes sans dégât magique (plus efficaces, à croire que tous les monstres ont des armures magiques). La magie bien que très utile à des moments ne m’a pas transcendé outre mesure. Peu pratique à utiliser et d’une puissance toute relative, elle m’a essentiellement servi d’attaque à distance.
Le rythme général du jeu peut être pas parfaitement maîtrisé sur la longueur, à moins qu’il ne s’agisse des environnements et du level design pas toujours aussi fou qu’en début de partie.
Je noterai également une toute fin en eau de boudin. Le dernier boss fut une vaste blague, profitant d’un rocher comme bouclier (!!), l’IA étant des plus rudimentaires.


Pour résumer, Dark Souls est un exemple à suivre à mes yeux. Un jeu qui marque autant par son ambiance que par la satisfaction d’en être sorti victorieux. Un jeu à contre courant des grosses productions actuelles, souvent préformatées. Pas de remplissage artificiel, de complétion futile, de challenge inexistant, ou de bonnes idées trop peu exploitées. L’aventure fut longue (chaque zone découverte me faisant croire à un jeu sans fin), périlleuse en diable mais au combien réjouissante. From Software a tapé dans le mille.

Polpoy
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le 18 nov. 2015

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