True Detective
8.2
True Detective

Série HBO (2014)

Voir la série

True Detective (avec juste une pincée de spoiler dedans)

Vous avez sans doute beaucoup lu sur True Detective, certainement la nouvelle série à voir en 2014. Vous avez sans doute tout lu sur Mathiew Mc Conaughey, probablement l'acteur le plus en vogue du moment, avec son accent du Sud et sa voix caverneuse. Qu'est ce que je peux donc ajouter à tout ça, me direz vous ?

Disons donc une petite liste de ce que je retiens de cette première saison, une semaine après avoir vu le 8eme épisode.

Tout d'abord, la qualité du duo. Dans le genre duo mal assorti, le casting est ici pointu et subtile. D'un coté, un mec plutôt paumé, désespéré, alcoolique et drogué, assez illuminé. Désespéré, et pourtant mû par une obstination, une volonté pugnace. On apprend très vite les blessures profondes qui le définissent et qui le font agir ainsi. De l'autre, un Red Neck pas très fin, paumé lui aussi, d'une autre manière, entre sa famille, l'alcool et les jeunes femmes (on n'avait pas vu Woody Harrelson aussi bon depuis... On avait déjà vu Woody Harrelson aussi bon que ça?). Leur différence fondamentale : le premier pense que l'Homme est fondamentalement mauvais, que rien de bon ne peut en sortir; l'autre adopte une vision quasi-biblique de l'humanité (nous sommes dans le Sud profond, après tout), pour laquelle l'Homme est bon, et que c'est le pêché qu'il faut chasser. Une scène de voiture d’anthologie du premier épisode met parfaitement en scène cette dissonance entre les deux collègues.

Ensuite, la photographie, sublime. Le mélange entre la beauté des paysages, et le coté poisseux de la Louisiane. Direction le Bayou... On en ressent l'humidité, la religiosité obscure et malsaine, une isolation du reste du monde... De quoi nous faire penser une fois de plus que la qualité des séries s'apparente de plus en plus à une qualité cinématographique (c'est un béotien qui parle, mais c'est mon ressenti). Cf à ce sujet le fameux plan séquence de la fin du 4eme épisode, pour s'en rendre compte.

Les changements de rythmes du récit, enfin. On est en pleine série à infusion lente. Rien de frénétique, juste une mise en place patiente, et qui pourtant captive. Les premiers épisodes nous posent les personnages, l'intrigue, assez simple : une série de crime, une enquête. Partant de là, une histoire à 2 trames permet des allers-retours constants et des ellipses narratives entre une salle d'interrogatoire, en 2012, et l'enquête initiale, en 1995. Les scènes contemporaines sont essentiellement des dialogues, très bons, décrivant les ressentis et les avancées de l'enquête de 1995. Puis à mesure que les épisodes avancent, les descriptions de 2012 s'éloignent de la réalité de 1995, jusqu'à la conclusion de l'enquête. On aurait pu en rester là, sauf qu'à l'épisode 6, brusque changement de rythme : on apprend la source de la brouille (profonde) entre les deux enquêteurs, puis que l'un d'eux à repris l'enquête en 2002 (3eme trame temporelle de l'histoire), la jugeant inachevé et plus complexe qu'il n'y paraissait. Les trois fils narratifs se rejoignent dans les épisodes 7 et 8 pour une conclusion finale de l'enquête, ainsi qu'une forme de rapprochement des deux flics.

Au sujet de cette conclusion, justement, et sans vouloir trop spoiler, j'ai volontairement éviter de ma laisser ''polluer'' par les avis des autres avant d'écrire ceci. J'imagine une certain nombre de déçus de cette fin, qui pourrait sembler trop classique ou convenue : pas de twist final, pas grand chose de grandiloquent, juste une enquête qui se conclut. De mon coté, j'avoue que j'ai eu besoin d'un peu de temps pour la digérer. Sans doute trop habitué aux fins de saisons en cliffhanger ou en apothéose, c'est vrai que j'ai été de prime abord un peu désemparé. En y repensant un peu, j'ai changé d'avis. En effet, le dernier épisode conclut l'enquête d'une manière logique : les découvertes et avancées des épisodes précédents ont en effet permis de découvrir l'identité des coupables et d'effleurer l'ampleur de leurs crimes. Pas de surprise finale, du genre, ''ah mais vous aviez oublié ce petit détail insignifiant de l'épisode 4'' ou ''ah mais on ne vous avait pas dit mais en fait...''. Non, rien de tout ça, juste une enquête qui se termine. Et deux collègues qui finissent leur mue, comme les membres d'un couple qui s'imprègnent l'un l'autre. Le désespéré voit la lumière pointer au bout du tunnel, alors que l'autre sent l'obscurité gagner le combat.

Ps : en bonus, le générique avec le superbe titre ''Far from any road'' de The Handsome Family : http://www.youtube.com/watch?v=Xyu_MdKBXic

Créée

le 17 mars 2014

Critique lue 747 fois

9 j'aime

2 commentaires

Phil Dela

Écrit par

Critique lue 747 fois

9
2

D'autres avis sur True Detective

True Detective
Gothic
8

Cohle of Cthulhu

Du jour où j'ai appris l'existence d'une série policière portée par le duo d'acteurs McConaughey/Harrelson, j'avoue avoir été emballé dans la seconde. Cerise sur le gâteau, HBO chapeaute le tout. Vu...

le 16 mars 2014

201 j'aime

True Detective
Jambalaya
9

Les Enfants Du Marais

True Detective est un générique, probablement le plus stupéfiant qu’il m’a été donné d’admirer. Stupéfiant par les images qu’il égraine patiemment, images d’une beauté graphique rare, images sombres...

le 12 mars 2014

152 j'aime

15

True Detective
Sergent_Pepper
8

Les errants du marais

Il est fréquent qu’on insiste auprès de quelqu’un qui ne se dit pas convaincu par une série : accorde-lui du temps, laisse l’univers s’installer, attends encore quelques épisodes avant d’abandonner...

le 26 oct. 2014

120 j'aime

13

Du même critique

Her
Philippe_Delaco
9

Her (en aspirant bien le H, souvenez vous de vos cours d'anglais)

Los Angeles, dans un futur proche. Dans une ville brumeuse, à la lumière dorée, on se sent comme engourdi. C'est beau et anesthésiant. Les humains arpentent les rues en parlant à leur oreillette...

le 25 mars 2014

25 j'aime

3

Voyages en Absurdie
Philippe_Delaco
7

Vous le savez peut être...

... et si vous ne le savez pas, allumez votre télé ou aller dans une librairie, Stéphane de Groodt a récemment publié un recueil de ses chroniques, intitulé ''Voyage en Absurdie''. Ne faisant ni une,...

le 27 févr. 2014

19 j'aime

15

The Grand Budapest Hotel
Philippe_Delaco
7

Grandeur et décadence de l'hôtellerie est-européenne...

Wes Anderson raconte une histoire. L'histoire d'une jeune fille, qui lit un livre. Un livre raconté par un écrivain âgé, accompagné de son jeune enfant jouant à ses cotés. L'écrivain raconte un...

le 6 mars 2014

13 j'aime

4