Si dans l'absolu ma préférence va pour Volunteers, After Bathing at Baxter's, en plus d'être une sacrée expérience, est le disque le plus représentatif de ce qu'a pu être Jefferson Airplane. Délire totalement barré et psychédélique, débordants d'idées (et de LSD), ce troisième album du groupe, faisant suite au déjà très bon Surrealistic Pillow marque une nette évolution dans le style musical du groupe, s'éloignant du pop-rock du genre Somebody to Love pour vraiment rentrer dans le rock psychédélique.


Emmenés par la talentueuse et charismatique Grace Slick, ainsi que de très bons musiciens, ils ont pleinement participé au mouvement hippie, avec comme sommet une prestation mémorable à Woodstock. Sorti en 1967 (très belle année musicale avec notamment The Doors et Strange Day des Doors, Axis : Bold as Love, Sergent Pepper's, Disraeli Gears ou encore les premiers albums du Velvet Underground ou des Pink Floyd), After Bathing at Baxter's est une sorte de concept-album avec cinq suites de morceaux pour en regrouper onze au total. À travers ces onze titres, ils offrent un patchwork de rock et pop sous une forte inspiration psychédélique et sous (forte) influence de la drogue. Ils arrivent à mettre en place une vraie atmosphère psyché, bizarre et expérimentale sans pour autant être déroutante et/ou lassante mais qui tient tout le long, notamment grâce à leurs talents et créativités. Ils proposent divers changements de rythme et ton et savent alterner entre des séquences vraiment calmes et d'autres bien plus puissantes voire folles, qui sont propices à de géniales inspirations, laissant exploser la virtuosité des musiciens, notamment à la guitare.


La première suite de morceaux (intitulée Streetmasse) commence de la meilleure des manières avec The Ballad Of You & Me & Pooneil et se finit en beauté avec Young Girl Sunday Blues. Deux morceaux psychés où le groupe propose une magnifique voix et de superbes arrangements, notamment la dernière cité, l'une de mes chansons favorites du groupe, cette dernière se rapproche d'ailleurs du style du précédent album. Entre les deux, on a droit à un court collage de divers sonorités et bruits, souvent étrange, c'est un peu inutile mais plutôt marrant, bien représentatif de son époque et assez court. Les deux prochaines suites de morceaux (The War Is Over (titre assez significatif dans ces temps où les USA s'enlisaient au Vietnam) et Hymn to an Older Generation) continue sur cette lancée. Commençant avec la belle et douce ballade Martha il se lance par la suite dans de l'irrésistible rock psychédélique où les solos de guitare fusent de partout, le chant toujours très bon, comme tous les musiciens d'ailleurs et surtout quelle ambiance ! C'est très psyché/hippie et c'est un régal. Par contre, c'est sur un ton bien plus inquiétant et sombre que se termine cette face avec l'excellente ballade reJoyce. Dans cette dernière le groupe fait vraiment preuve d'inventivité en y incluant divers instruments, comme sur l'ensemble du disque (sitar, orgue...).


C'est avec les deux dernières suites de morceaux que l'on rentre pleinement dans le trip psyché du groupe. Malgré un décevant Watch Her Ride, c'est avec les neuf minutes de Space Chaynge que le Jefferson Airplane nous emmène vraiment dans leur univers totalement loufoque et acide. C'est irrésistible et sous ce déchaînement de solos de guitare (excellent Jorma Kaukonen), l'immense basse de Jack Casady et la puissante batterie participent aux différents changements de tons, débutant comme un bad trip avant de faire parler la folie. C'est là que le groupe et l'album prennent tous leur sens et c'est juste fabuleux. Le suivant, l'ouverture de la dernière suite est elle aussi immense avec une merveilleuse Grace Slick tandis que l'inventivité et la virtuosité du groupe sont au sommet. La double chanson qui clôt l'album, Won't You Try/Saturday Afternoon ferme ce monument psychédélique en beauté. Un album (dont la superbe pochette est signée Ron Cobb) important dans l'histoire de la pop culture, un album qui marque surement l'apogée d'un groupe (jusqu'à Woodstock) qui aura contribué à ce vent de liberté, contestation et créativité lors de la seconde partie des années 1960.


C'est donc un album important que nous livre Jefferson Airplane et surtout un album totalement fou et psychédélique où le groupe laisse parler leur expérimentation, virtuosité et improvisation, le tout sans fausse note et j'ai pleinement adhéré au trip. Suivront deux albums puis le sommet Woodstock avant que ce groupe ne connaisse un déclin puis se sépare. La belle Grace Slick ira, avec son guitariste Paul Kantner, former Jefferson Starship en 1974.

Docteur_Jivago
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le 27 avr. 2015

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