Pour être honnête, je n'ai pas aimé ce disque à la première écoute, comme d'ailleurs la plupart de mes disques préférés. Mon principal argument était le chant, et ce dédoublement quasi permanent de la voix. C'est un des rares éléments non cartésiens de l'album, avec l'apparition de cuivres ça et là, car pour le reste tout transpire la maniaquerie de l'angle droit.
Alors pour essayer de comprendre le phénomène Antidotes, j'ai cherché à en savoir plus sur les différents membres du groupe, et à présent je vous propose quelques lignes directrices biographiques.
Né à New York, d'un père architecte et d'une mère géomètre, le chanteur du groupe montre des aptitudes prometteuses pour une carrière dans le BTP. Le fils prodige qu'on surnomme le "rapporteur" développe un œil infaillible pour corriger les perpendiculaires de guingois et redresser les cadres de travers. La réputation du jeune homme va crescendo et le conduit dans les agences d'urbanisme, de design et les montages d'expositions d'art contemporain des plus grands musées quand la technologie stoppera net le rêve américain, avec l'invention du niveau de chantier laser.
Le guitariste baigne dans le monde artistique depuis son enfance. En parallèle de ses cours d'instrument, on lui reconnait un esprit critique pointu sur les œuvres de Piet Mondrian, Niele Toroni ou Jean-Pierre Raynaud. En totale admiration, il envisage une formation de carreleur mais abandonne rapidement suite aux méthodes peu conventionnelles de son professeur, qui réalise un dosage "à la louche" de la colle à carrelage.
Développant très tôt une allergie au latex contenu dans les ballons de baudruche, le bassiste trouve dès son plus jeune âge du réconfort dans les lignes droites et les repères orthonormés. Ses anciens camarades confieront d'ailleurs son goût croissant pour les coups de règle carrée administrés par l'instituteur, allant même jusqu'à faire tomber méthodiquement les nombreuses équerres de sa collection en classe pour les provoquer.
Le claviériste débutait sa carrière dans le monde merveilleux de la comptabilité et venait d'être nommé inspecteur des impôts lorsqu'un incident fâcheux lui dicta de se tourner vers la musique (d'après mes recherches, il semble que ce soit le nombre impair de stylos à billes dans son pot à crayons, mais les avis divergent).
Quant au batteur, sur qui on a très peu d'informations, on dit qu'il est capable de couper une tarte aux pommes en 9, voire 11 parts parfaitement égales (certains avancent même le nombre de 17 parts).
Voilà, vous savez tout, bande de veinards. Maintenant fermons cette parenthèse.
Foals est un groupe métronomique qui respire la cohésion. Oui c'est difficile de jouer en rythme, en particulier sur des mélodies morcelées qui alternent les pleins et les vides. Et il faut beaucoup d'entente pour en arriver là, ce qui doit se remarquer d'autant plus en live (malheureusement je ne peux que le supposer, car je n'ai pas encore eu la chance de les voir).
Le plus étonnant dans tout ça, c'est qu'à l'issue d'un tel travail il se dégage de la fraîcheur et beaucoup d'amusement sur cet album. Alors oui, peut-être que j'ai romancé un tantinet sur la vie des musiciens, mais avouez qu'ils devaient avoir certaines prédispositions.
Autrement dit, les risques étaient calculés.
