Chris
6.2
Chris

Album de Redcar (2018)

Ou quand une polémique gâche un album

      Je ne pourrai pas commencer ma chronique du second album de « Chris » sans aborder la controverse (en fait en me relisant, je parle quasi que de ça) qui a eu lieu concernant son premier single « Damn (Dis-moi) » et la défense de l'artiste elle-même, à savoir : « Je n'ai pas plagié, j'ai samplé une boucle libre de droits. Quand Gainsbourg empruntait des mélodies à Chopin, est-ce que c'était du plagiat ? » Bon, ne te compare pas déjà à Gainsbourg s’il-te-plaît. Effectivement, difficile de parler de plagiat ici, par contre ne devrait-on pas attribuer le succès de ce tube à Logic Pro eux-mêmes ? Parce que bon, un travail de sampling nécessite tout de même une certaine part de recherche de la boucle parfaite, alors qu'ici, elles lui sont toutes offertes sur un plateau, ou plutôt sur un programme.
Quand j'étais môme, j'ai découvert l'art de la composition avec les logiciels de la gamme Ejay (merci pour tout), qui ne proposaient rien d'autres qu'un multi-piste minimaliste et des milliers de samples libres de droit. Je me suis beaucoup amusé avec durant mes premières années au collège jusqu'à ce que je me rende compte de l'évidence quand mes amis me félicitaient « J'aime beaucoup ta chanson » : ce n'était pas moi qui l'avait composé ! Merde ! J'avais assemblé des petits bouts comme un puzzle pour finir avec des tableaux que n'importe qui aurait pu peindre. Le programmateur du logiciel avait sans doute eu les idées avant moi. J'ai donc commencé à expérimenter les petits plugins à côté qui permettait de créer difficilement ses propres boucles. Je ne pouvais pas mentir plus longtemps, ça me mettait mal.
Cela ne semble par contre pas poser de problèmes à notre chère Christine qui aurait « ajouté la mélodie de chant, les arrangements »… Ben Christine, pas vraiment non plus puisque la majorité des boucles viennent du logiciel et ta « mélodie de chant » est calquée sur le riff de synthé que tu as « emprunté ». Tu aurais pu au moins attribuer la moitié des crédits de composition à Logic Pro ou, comme le font une partie des DJ, ajouter une mention « contient un sample de… » dans le livret de ton album.
C'est d'autant plus rageant qu'elle a choisi « Damn (Dis-moi) » (donc un titre qui n'est pas d'elle, mais libre de droit) en premier single de l'album alors qu'on sait pourtant que Christine est capable de composer de bons morceaux Pop. Son premier album « Chaleur Humaine » nous l'avait prouvé, quoi que ceux qui n'aiment pas la Pop en pensent. Pourquoi ce choix ? Tactique promotionnelle ? En tout cas, pour avoir suivi le personnage depuis (quasi) le début, à savoir sa première partie pour Austra aux Trinitaires de Metz en 2010, je peux comprendre les fans qui ont pris la chose comme une trahison.
Pour ma part, cela n'a fait que gâcher l'écouter de ce Chris. Globalement, nous avons la même tambouille Électro-Pop minimaliste que sur le précédent, avec des gimmicks entre Mickael Jackson et Jeanne Mas (j'aime beaucoup les deux, je ne dis pas ça pour être piquant). Mais à chaque morceau, je me suis demandé ce qui était d'elle, ce qui était de Logic Pro ou de je ne sais qui d'autres… J'ai beaucoup de soupçons quant aux pistes de boite à rythme, qui pour moi sentent les boucles d'usine. Un petit goût amer donc, dont ne sont ressortis que deux, trois titres, dont le jubilatoire « Goya ! Soda ! ».
Dans les points positifs, l'album est sorti en version française et anglaise, ce qui ne change pas grand chose puisque les deux versions donnent toutes les deux dans le « franglais ». Néanmoins, sur certaines titres, on est susceptible de préférer une version à une autre, je pense à « 5 dollars » dont le “Baby Blu-ue” sonne beaucoup plus naturel et logique en version anglaise. Si l'on ferme les yeux sur la polémique, on reste face à un album Pop tout à fait convenable et dans l'ère du temps.
Et justement, l'ère du temps a fait dire à l'artiste une dernière connerie en interview, sortant pour justifier la polémique le fameux « On se permet de douter que je puisse être auteur et producteur parce que je suis une femme » ce qui est contourner le problème par un mauvais réflexe… On ne va pas faire la liste des auteurs/compositeurs femmes qui sont reconnus comme telle aujourd'hui par la méchante société patriarcale mais… Attends voir Chris… T'es pas censé être un boy maintenant ?
Strangeman57
6
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le 26 oct. 2019

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