D'aucuns avaient vu dans Oracular Spectacular des débuts en fanfare. Mouais. En fait, non: juste trois singles et puis rien d'autre. Mais quels singles ! Des bombes pop, d'une beauté confondante ("Time To Pretend", "Electric Feel", "Kids") qui juraient presque avec le "vrai" contenu de l'album, d'une pauvreté mélodique ahurissante.
Dans ces circonstances, qu'est ce qu'on pouvait bien attendre d'un second disque de MGMT ? En tout état de cause, bien malin celui qui aurait pu prévoir le concept album, tel que se présente Congratulations. Certainement prévu pour être écouté d'une traite (unité de son et d'esprit), ce deuxième disque s'aborde difficilement; on pourrait même dire que la pop progressive seventies n'est pas loin...
Ainsi, la première chose qu'il nous faut admirer chez ce jeune binôme, c'est son courage. Alors qu'ils avaient probablement tout en mains pour nous pondre un jumeau de Oracular Spectacular, ils se lancent à corps perdus dans une succession de titres sans réel refrain fédérateur, assez décousus pour échapper définitivement à l'étiquetage "single" tel qu'on l'entend actuellement.
En ce sens, ol'album s'apprivoise assez difficilement. Mais quand on prend la peine de s'y attarder, on y découvre d'abord une succession de chansons pop intemporelles, d'une belle vitalité : ainsi, la première partie de Congratulations est proprement impeccable, et enveloppe l'auditeur d'un halo bienfaisant. L'image est simplette mais l'on s'imagine aisément le coucher de soleil rouge rouge rouge, les mains derrière la tête sur sa serviette de plagiste. Et c'est bon, dieu que c'est bon !
Malheureusement, le rêve s'évapore dès que Ben Goldwasser et Andrew VanWyngarden poussent le bouchon vers le "vrai" progressif, à savoir le morceau de bravoure de plus de dix minutes. Ce ne sera pas leur faire offense que de leur dire que "Siberian Breaks" est raté. Parce qu'il renvoie immédiatement à une époque précise (fin 60, début 70), à un genre tellement défini (la pop progressive donc, seulement en filigrane à ce stade de l'album et qui éclate au grand jour sur ce titre), et donc à ses cadors (Genesis en tête), "Siberian Breaks" souffre de multiples comparaisons. Et s'écroule sous le poids de ses influences : les différents gimmicks s'articulent mal, le retour à la mélodie d'ouverture est prévisible, bref c'est raté.
C'est d'autant plus malheureux que par la suite, MGMT ne retrouve vraiment jamais la grâce des cinq premiers titres, entre un "Brian Eno" gentillet mais un peu émoussé, un "Lady Dada's Nightmare" ambiant mais un peu chiant et enfin la chinoiserie "Congratulations", avec sa toute petite mélodie orientaliste en guise de seule idée... C'est un peu court et d'autant plus frustrant en regard de la belle simplicité qui anime la face A.
En définitive, MGMT ne montre ici qu'une autre facette de sa personnalité : celle qui pourrait construire un album superbe de pop complexe et aérienne. Au même titre qu'on les sentait capables de sortir une collection de singles imparables. Depuis, ils n'ont produit ni l'un ni l'autre.