Cure
6.3
Cure

Album de Eddy de Pretto (2018)

En dépit de sa prétention à ne pas respecter les codes, c'est très convenu dans le fond. Dans Kid, par exemple, il se veut rebelle et anticonformiste à coups de "mais moi, mais moi". Mais il répète au mot près le discours le plus convenu sur ce que doivent devenir la virilité et les rapports femmes-hommes (que je suis le premier à souhaiter voir évoluer). Il a bien le droit de ne pas avoir un avis original, mais pas celui de faire passer ça pour une révolte. Là il feint.


Voilà pour le fond. Pour le reste, il me semble que peu de gens prennent la peine de noter qu'il écrit mal. Si mon jugement est si définitif, c'est parce qu'Eddy de Pretto a le défaut le plus accablant qui soit pour quiconque aspire à un minimum de lyrisme: il force les rimes. Forcément, c'est au détriment du sens et ça me donne, à moi, le sentiment pénible d'écouter un vaniteux sans propos.
J'aurais une toute autre indulgence si cet album n'avait pas ces prétentions. Or il s'agit constamment d'apparaître incompris, de se poser en espèce de poète urbain. Quand Stromae fait ça (puisqu'il paraît que les deux se ressemblent), j'ai beau ne pas l'adorer, je ne conteste pas; il n'est pas dans la posture. Quand de Pretto chante "je suis complètement normal, complètement banal" en guise de refrain,est-ce que ce n'est pas en fait le comble du narcissisme? Eddy de Pretto parle d'Eddy de Pretto, et c'est comme ça pendant 15 morceaux, quel que soit le sujet évoqué. J'attends autre chose d'un artiste.
Le plus cruel, c'est qu'au-delà des apparences soignées, hélas, je décèle peu de choses. Ses textes sont en fait à lire au premier degré dans leur grande majorité. Il n'y a rien à gratter, tout est offert. Et si en plus, comme je le dis plus haut, le propos lui-même n'est pas révolutionnaire, que reste-t-il?


Je n'évoque la musique que maintenant, et ça veut tout dire. Il ne parle de son travail de musicien que rarement en interview. C'est un problème que la chanson française a toujours eu. Bizarrement, ses plus grands ambassadeurs sont ceux qui soignaient le plus la musique et la liaient avec le plus de soin à leurs textes (pas besoin d'être grandiloquent pour autant, Brassens faisait ça très bien). Le fait qu'il n'utilise sur scène que son iPhone pour balancer sa musique me semble assez révélateur. Je me demande d'ailleurs ce qu'il donne en concert. Le tempo varie si peu d'une chanson à l'autre que je serais curieux de voir comment il s'en sort

Manu-D
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le 28 mars 2018

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Manu-D

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