Day of Reckoning
7.5
Day of Reckoning

Album de Pentagram (1987)

Rares sont les productions qui, soulevées par le statut d’objet culte, survivent à l’anonymat qui leur était pourtant destiné. Pourraient-être cités pêle-mêle Black Sea d’XTC pour la new wave, Awaken the Guardian de Fates Warning pour le metal progressif ou Squeezing Out Sparks de Graham Parker pour le pub rock conscient. Si Black Sabbath reste le précurseur incontesté et incontestable du mouvement doom, le valeureux nom de Pentagram revient régulièrement sur toutes les bouches alertes, ce grâce à un album, parangon du cultissime : Day Of Reckoning. Paru en 1987, soit deux ans après le tardif Relentless, il célèbre et redéfinit les bases d’une musique plombée avant tout influencée par la décennie précédente. Aux antipodes des préoccupations musicales de ses contemporains Motley Crue, Guns n’ Roses et The Cult, Pentagram lorgne cette année là du côté des pionniers de Black Sabbath (Master Of Reality) et des oubliés de Pagan Altar (Volume 1).

Tant alourdi que clarifié, le son de Day Of Reckoning se voit grandi d’une production aux inflexions mystiques et caverneuses. Irréductibles, les puissants Victor Griffin et sa guitare, aussi rigides et irréversibles que la poigne d’un cadavre, s’appuient sur l’ambiance cryptique pour asséner coups de riffs et frappes de soli avec une dextérité qui n’est pas sans rappeler celle de Toni Iommi sur Sabbath Bloody Sabbath. D’ailleurs, comme sur SBS, l’heure est au désespoir et à la repentance qu’il induit ; Pentagram rappelle qu’il n’y a de repentance que dans les plus grandes détresses, alors qu'à l'inverse, on ne s’excuse que des futiles erreurs. Et Bobby Liebling n’est pas là pour s’excuser, bien au contraire. L’impitoyable chanteur, détaché de toute émotion parasite, fait le bilan de ses actions et erreurs passées avec un fatalisme diabolique : le chant de « Broken Vows » signe de sa désinvolture résignée une des plus déstabilisantes lignes vocales de l’album, tout en appuyant avec conviction le groove mis en place avec succès par Griffin. Et le reste de l’album n’est constitué que de cet improbable mélange entre mélodies plombées et groove inquiétant, pour preuves les puissantes « Madman » et « Wartime » qui clôturent l’album. Sans oublier « Burning Saviors », neuf minutes, mi-acoustique, sombre et marécageuse en diable, réminiscence de « Sleeping Village » (Black Sabbath) et « Embryo » (Master Of Reality) pour ses arpèges, « The Mob Rules » pour son magnifique solo. Notons que la courte durée de l’album (environ 34 minutes) est judicieuse car elle permet la mise en place rapide d’une atmosphère cohérente qui évite astucieusement le futile remplissage.

Il sera retenu de Day Of Reckoning que son statut d’album culte lui va à ravir. Les exploits contre vents et marées de Pentagram ne s’arrêtent pas là mais touchent déjà un point culminant qui apportera aux amateurs de Black Sabbath, Saint Vitus ou Cathedral une réelle satisfaction sur la longue durée.
BenoitBayl
9
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le 5 déc. 2013

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Benoit Baylé

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