Debut
7.5
Debut

Album de Björk (1993)

Mon voyage motivé par Homogenic commence aux sources, par delà son premier album, Début, datant de 1992.


Rien que par le premier titre, Human Behaviour, Björk nous emmène déjà dans son exotisme musical que les connaisseurs lui connaissent. Une danse enivrante et prenante sur les humains, leur comportement, que l'islandaise semble être loin de comprendre. Tandis que nous plongeons dans cette étrangeté entraînante à base de percussions, de sa voix hypnotisante zizgaguant au milleu de ces dernières et des volutes électros qui l'accompagnent, nous nous perdons dans cette jungle artistique dans lequelle la jeune chanteuse nous invite.


Titre qui décrit bien ce que l'album semble être, une jungle, belle, mais sauvage, dans laquelle il faut trouver son chemin.


La voix de Bjork sera le repaire dans ce voyage, puissante et d'une pureté légendaire, elle guidera de sa fraîcheur les plus réticents à travers les étrangetés instrumentales qui constituent l'album.


Nous passerons par le mélancolique mais étrangement enjoué Crying, le beau et féerique Venus as a boy, se dressant comme une des plus connues chansons de l'artiste, digne d'une comédie musicale. Il s'agit d'une ode romantique à son copain de l'époque, elle est une ballade enchantée, en chantant le monde autour qui semble se couvrir de beauté poétique et de la passion exprimée par la chanteuse. Ces 3 premières chansons seront l'introduction de l'album, posant le décor.


Une sorte d'ovni suivra ensuite, par There's more to life than this. Inconfortable, difficile à identifier, une sorte d'hérésie dansante mêlée à des bruits de foule, au texte comme décrivant une envie de fuir la réalité ici sous la forme d'une boîte de nuit agitée.


Pourtant par la suite, la féerie sera de retour par Someone in love. Digne d'un conte de fée, comme une contine sortie de la bouche d'une princesse attendant désespérément son prince charmant, accompagnée d'une harpe enchanteresse, elle sera pourtant particulièrement mélancolique. Son venus semblant lui causer quelques douleurs à l'âme.


La féerie sera brisée par l'agressif mais entraînant, Big time sensuality. Nous faisant part de sa peur de l'amour charnel, qu'elle qualifie comme un véritable évènement, le fameux "grand moment de sensualité", nous nous surprendrons à plonger dedans, dans cette spirale au texte sensuel et aux sonorités discos.


Par la suite, l'espoir semble balayer les douleurs et la frayeur, par One day. Un jour, tout ira bien, le futur sera meilleur, brillant, le destin sera radieux, les rêves accomplis. Voilà ce que nous dit Björk dans cette entraînante hymne à l'espoir aux basses légères mais présentes, et aux sonorités indies. Encore une fois semblant sortie d'une comédie musicale, on ne peut que s'imaginer dans ce long voyage vers le bonheur, sous-entendant que le point de départ n'est guère recommandable. La chanteuse ne se sentant donc guère si bien que cela, pour espérer des jours meilleurs qu'elle nous souhaite et souhaite possiblement aussi à son copain de l'époque.


Une mélancolie sous-entendue qui pourtant reviendra explicitement dans le prochain titre, Aeroplane, titre uniquement réduit en référence dans la chanson précédente. Björk nous parle toujours de voyage, mais pas réfléchi vers le bonheur contrairement à précédemment, mais d'un voyage qui consiste à se jeter à corps perdu dans la poursuite de l'être aimé à travers le monde, métaphore de l'insupportable sensation de ce dernier que l'on sent s'éloigner émotionnelement, nous poussant à déplacer des montagnes pour l'en empêcher, parfois veinement. Cette chanson se veut dotées de mêlés airs jazzys, qui viennent étrangement se mêler aux voix de fond et à la voix pure de la chanteuse.


Tandis que le prochain titre, Come to me, lui sera d'une sensualité passionnelle particulièrement intense. Un texte d'une infinie tendresse, pour une partie instrumentale à base de beats et de volutes douces, une instrumentale enivrante créant une bulle romantique que la chanteuse d'une voix douce nous invite à ne pas briser pour laisser les émotions s'exprimer par elle mêmes, sans paroles. L'amour de la chanteuse semble si fort, qu'elle le laisse paraître par toute ces attentions, tout ce qu'elle est capable de faire pour s'assurer que son amour ne la quitte pas. Cette contine romantique flirte presque avec l'érotisme.


La prochaine en revanche, le dérangeant mais inquiètant Violently happy, sera la douche froide. La voix de Björk, autotunée, les sonorités discos et entraînantes, sonneront dérangeantes. Elle y parlera des tourments que lui cause cet amour et cette passion, un bonheur qui la tourmente, qui la fait brûler, elle est tourmentée mais épanouie, violemment heureuse, dans un constant état d'urgence. C'est ce qu'elle nous dira dans cette sorte de balade aux sonorités électros, au clip surréaliste comme montrant ses tourments d'esprit, cet amour qui la rend folle et la deshumanise.


Pourtant, le calme reviendra par la suite. Par une nouvelle ballade, bien plus calme et pure instrumentalement parlant. The Anchor song, par ses accordéons doux et apaisants accompagnant la voix pure de la chanteuse qui nous avoue qu'elle ne pense pas faire partie de ce monde, mais plutôt qu'elle aimerait disparaître dans l'océan, où elle se sent chez elle, est émouvante et touche en plein cœur.


Pourtant, c'est un final bien mélancolique que la chanteuse nous réserve. Play Dead, chanson trip-hop, est selon moi le meilleur titre de l'album. Aussi triste que jouissif, ce Play dead brise le cœur, emporte l'âme, et foudroie le corps. Une instrumentale intense, sombre et puissante, pourtant ennivrante et d'une beauté noire, sa voix, pure mais brisée, ici torturée qui alterne entre murmures plaintifs et hurlements mélodieux. Elle nous livre ici une performance vocale tout bonnement extraordinaire, d'une beauté qui n'a d'égal que la douleur que l'islandaise ressent, son cœur brisé s'exprimant sans filtres. La souffrance, pour la supporter, elle a choisi de l'enlacer. Lassée de ce grand huit émotionnel qui l'épuise et lui torture l'esprit, elle a choisi de plonger tête la première dans cette peine, de l'accepter et de la laisser l'emporter, de ne plus la combattre. Un pur chef d'oeuvre d'une noirceur aussi belle qu'immense clôture le premier album de l'islandaise.


Une chose interloque cependant, le fil conducteur. Il est en réalité à interprétation. Début est un journal intime, ou Bjork nous parle d'amour et de désir, nous fait part de questions existentielles, et sert de refuge en cas de mal-être.


Si les chansons n'ont pas de lien, c'est parce qu'elles semblent être guidées par les pensées et émotions de la chanteuses, exotiques et imprévisibles, comme l'humain.


Il s'agit aussi d'un album innocent, les pensées rêveuses d'une gamine. Parfois d'une violence crue et brutale, parfois mignonnes et fleur bleu. Cependant, le tout sera toujours parcouru de cette immaturité enchanteresse, que ce soit dans les joyeuses ou tristes expériences qu'offre la vie.


Malheureusement, je salue l'audace et l'ambition de cet album, mais ses extrêmes m'ont parfois un peu perdu. Entre ce côté très jazzy pour passer par la suite à une violence disco, m'ont valu de faire un peu descendre la note que son ambition voudrait pourtant faire monter plus haut.

lordkobraa
6
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le 19 juil. 2020

Critique lue 220 fois

lordkobraa

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