Experience
6.9
Experience

Album de The Prodigy (1992)

"La première fois, c'est toujours un peu décevant", qu'ils disent...

Je vous en parlerai sûrement dans d'autres critiques, mais autant planter le décor tout de suite : le big beat, c'est ce qui m'a réconcilié avec la musique électronique. C'est ce qui m'a prouvé que l'electro, ce n'était peut-être pas uniquement un genre créé et pratiqué par des gens sans aucune culture musicale ou talent qui alignent paresseusement des beats de batterie interchangeables et du gros "boum-boum" qu'ils vont ensuite foutre dans une playlist préprogrammée et passer ça sur les dancefloors d'Ibiza et tout le monde lève les mains en l'air comme une bande d'abrutis.


Ouais, je sais, ça sonne élitiste. Mais revenons à The Prodigy, qui est l'une des locomotives du big beat avec les Chemical Brothers et Fatboy Slim, et parlons de ce premier album, Experience (précisons que là, je critique sa version "Expanded", qui contient les différentes faces B et les remix datant de cette période).


A l'origine de The Prodigy, on a Liam Howlett, un gars de l'Essex qui avait commencé à faire de la musique en 1989, après avoir rencontré Keith Flint, chanteur et danseur. Les deux étaient à une rave où Howlett était le DJ et Flint lui demanda s'il pouvait pas lui faire une mixtape. Ce à quoi notre bon ami répondit en lui donnant quelques jours plus tard une cassette contenant plusieurs démos de chansons qu'il a lui-même créé. Flint et un autre mec, Leeroy Thornhill, danseur et claviériste, adorent et se mettent à développer de nouvelles danses basées sur la musique avant de suggérer à Howlett l'idée de faire un groupe tous ensemble. Et c'est après avoir embarqué avec eux deux amis de Flint, Maxim Reality et Sharky, que l'aventure commence.


Et après la sortie d'une cassette démo de 10 titres, une signature chez XL Recordings et la sortie d'un premier EP, What Evil Lurks, en 1991, Experience sort l'année suivante, alors que le son de la musique rave se diffuse peu à peu dans tous les clubs du monde entier. Comme vous pouvez vous en douter, c'est loin d'être mon album préféré du groupe. Et la raison du pourquoi tient en une raison très simple : j'ai jamais vraiment pu écouter aucun morceau de cet album jusqu'au bout. Ou en tout cas, si j'ai réussi à aller au bout, c'était quand même en ayant envie de direct passer à un autre morceau.


Parce que comme je l'ai cité, Experience est avant tout un album de musique rave (et de techno hardcore) et, merde, je pense que la musique rave, c'est pas un truc que je dois écouter tous les jours. Sous peine de me taper des migraines carabinées. En gros, pour caricaturer, c'est une musique très rapide, à la fois très lourde et légère et qui repose sur pas mal de beats et de séquences déjà crées. Bon, même en caricaturant, je l'explique mal, donc gardez surtout en tête que cette musique est surtout faite pour accompagner la prise d'ecstasy, qui était la nouvelle drogue en vogue chez les clubbers.


Et je pense que c'est un peu ça, le problème. Je suis très loin d'être un consommateur régulier de drogues, d'alcool ou de quelque substance illicite que ce soit, incluant donc l'ecstasy. Cela amène donc dans mon cerveau l'hypothèse suivante : si j'écoute un album d'un genre de musique particulièrement lié aux drogues sans prendre de drogue, suis-je dans les meilleures conditions pour l'écouter ? Mon écoute d'Experience me laisse fortement penser que non, clairement pas. En fait, pour apprécier pleinement n'importe quel type de musique, ce qu'il me faut, principalement, c'est des mélodies. Après, ça peut être n'importe quelle mélodie, tant qu'elle est présente. Là, y'en a clairement pas. Et à cause de ça, j'aime pas vraiment Experience.


Néanmoins, j'lui ai mis 5 parce qu'il n'est pas complètement à jeter et parce qu'il a tout de même deux grandes qualités. Déjà, il contient pas mal de bonnes idées et quelques bons moments qu'on peut souvent réussir à glaner par-ci par-là. La première minute de Jericho, le riff de synthé de l'intro de Your Love, le piano sur Wind It Up et le remix de Weather Experience par Top Buzz (ce dernier riff étant même assez joli), le riff de banjo sur We Are The Ruffest... y'a pas mal de petits trucs qu'on peut dénicher et se dire "Oh, ça, c'est bien". Et enfin, Experience est déjà un signe annonciateur d'une des plus grandes qualités de Liam Howlett en tant que musicien (qualité qu'il partage d'ailleurs avec les grosses locomotives du big beat), qualité qui va se retrouver sur tout ce qu'il fera au sein de The Prodigy : sa culture musicale et sa science du sampling.


Clairement, ce mec a écouté beaucoup de musique, est loin d'être un branque et tient à nous le faire savoir. Et tout comme les bonnes idées précédemment mentionnées, les multiples samples présents dans les musiques de l'album sont des petits trucs à glaner par-ci par-là, ce qui peut vite devenir très jouissif si comme notre cher Liam, vous avez vous aussi écouté beaucoup de musique au cours de votre vie. En vrac, on trouve du James Brown, le thème d'intro de Shining, du T La Rock, du Run DMC, du Wilson Pickett, un extrait d'un morceau de la BO du film Flash Gordon réalisée par Queen, du AC/DC... et encore, je ne cite que les trucs les plus connus.


En gros, c'est ça, Experience. Une expérience (lol) pas mal bancale, pas des plus attirantes et qui n'est pas là pour vous accueillir gentiment, mais qui peut se laisser apprivoiser et qui est loin d'être complètement merdique. Et surtout, après cet album et alors que le morceau Charly avait lancé la mode des musiques rave contenant des samples de bruits de cartoons (aimée par les fans, détestée par les critiques), Howlett va avoir en tête de se distancier d'une scène rave qui n'en a déjà plus pour longtemps (notamment avec le Criminal Justice Bill, qui allait être appliqué dans 2 ans) et de consolider le son du groupe. Une décision qui allait pouvoir permettre au groupe de révéler tout son potentiel et de devenir l'un des meilleurs représentants de la musique électronique dans le monde entier. Et de nous lâcher pas mal de très bons albums, au passage...

AntoineFontaine
5
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le 12 oct. 2019

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