Après la déferlante des amateurs d’heroic-fantaisy dans les librairies du monde entier pour s’arracher les quatre premiers opus de la saga Harry Potter, il était logique de voir un tel matériau, développant magie et action, porté sur grand écran. Le choix de Chris Colombus fut compliqué pour ce qui est de la réalisation (on parla de Spielberg, Zemeckis, Gilliam, …), mais par contre, pas du tout pour la composition : John Williams. Et quand on appelle un dieu vivant pour donner dans la magie et la merveille, ça donne l’une des plus grandes Bo de tous les temps.


En plus d'être merveilleuse en soi, cette Bo est un monument de part tout ce qui l’entoure : le contexte d’écriture, et ce qu’elle a engendré par la suite. Ce n’est vraiment pas pour rien que le tandem Colombus/Williams fonctionne à nouveau (après les Home Alone), les deux ayant un engouement particulier pour la magie destinée aux enfants ; Chris Colombus n’a donc pas hésité une seule seconde quant au choix à faire dans le domaine de la musique.


Digne successeur de Hook, cette Bo nous offre une richesse orchestrale absolument phénoménale, c’est une déferlante de notes à chaque instant, qui fera jouir le premier amateur en musique de part la beauté de son organisation. Il y a absolument tout, chaque famille, chaque instrument est sollicité de x manières différentes, toujours de manière novatrice, et transcende quasiment chaque scène du film (il y aurait franchement peu de différences entre une projection du film et un ciné-concert tant la bande son est proéminente, et valorisée à chaque instant). La musique est dans ce film proportionnelle à la magie qu’on nous délivre, c’est pourquoi nous sommes immédiatement sous le charme en tant que spectateur, puisque tout vient en même temps. Là où l’on s’en rend vraiment compte, c’est lors de l’avalanche de lettres dans le salon des Dursleys, où l’orchestre s’enflamme pour la première fois : l'alchimie agit inconsciemment sur nous, en nous délivrant tant de quantité et de qualité d’un seul coup que cela nous marque très positivement, et donc devient un souvenir mémorable. La première vue du château de Poudlard l'illustre encore mieux. Dan l'absolu, tout le film agit sur le même principe.


Bon, commençons par les thèmes. Alors que le grand public ne se souviendra que du cultissime "Hedwig’s Theme", il en existe bon nombre d’autres et pas des moindres, tous maîtrisés et exploités avec le plus grand perfectionnisme : le somptueux thème de Harry dans la scène finale qui arrache les larmes de ceux qui ne les avaient pas déjà versées (une lenteur très bien exploitée), le thème de la Découverte, capable avec trois notes d’osciller entre plusieurs registres (noble avec ses voix dans "Diagon Alley and The Gringotts Vault", mystérieux et menaçant aux trombones dans "The Face of Voldemort", …), du Quidditch (véritable fanfare épique avec trompettes de bon aloi), de Voldemort et Vous-Savez-Qui (un motif chacun), … Si vous voulez tous les répertorier, vous dépasserez largement la vingtaine, tant il s’est appliqué à valoriser chaque élément restitué du livre par le film (la Forêt Interdite, la Cape d’Invisibilité, le Chemin de Traverse, les Gobelins ont leurs propres thèmes). Bref, mélodiquement, c’est juste une mine d’or.


Et harmoniquement ? Irréprochable. Tout interagit avec une synchronisation incroyable, les doublures (mélange de deux instruments différents) sont fins et franchement novateurs, et confère une identité immédiatement remarquable à Harry Potter (qui ne reconnaîtrait pas "Platform Nine and Three-Quarters" avec son somptueux thème et ses avalanches de notes aux xylophones et aux grelots festifs ?). Les cuivres jouent tous les rôles : l’épique, le fataliste, la tension, le solennel ("Leaving Hogwarts"), … Pour ceux qui cherche le nom de l'instrument qui produit le son si particulier des premières notes du Hedwig's Theme, il s'agit du célesta =) Les bois et les cordes sont on ne peut plus versatiles, et l’on retrouve l’esprit de Hook : capables tantôt d’interpréter les plus beaux motifs à l’unisson (le thème de Harry dans "The Norwegian Ridgeback and A Change of Season"), et sitôt de virevolter, de sautiller et de jouer par touches subtiles de manière extrêmement vive et saccadée ("The Quidditch Match" est un chef d’œuvre rien que dans ce domaine, et comporte des partitions juste injouables pour des instrumentistes non-émérites ^^). Repousser les limites de l’orchestration en développant des procédés hors du commun (on avait vu ça avec Indiana Jones 1, mais on recherchait plus l’efficacité dans l’émotion ressentie au visionnage que le réel plaisir à l’écoute. Ici, les deux sont synonymes), tel est le génie de John Williams.


On l’a vu, tous les registres sont abordés, du sentimental ("The Invisibility Cloak and The Library Scene" est très efficace, surtout sur nos yeux) au martial ("The Chess Game" présente l’un des plus beaux ostinatos jamais composés à ce jour, trouvant le moyen d’être développé en seulement 40 secondes lors de la manœuvre de la Dame Blanche avec l’entrée progressive des cordes, des tambours, et des cuivres agissant en gradation) en passant par les festivités de Noël (après Home Alone, c’est une ballade ^^) où Williams composa et écrit lui-même les paroles de "Cast A Christmas Spell" audible dans "Christmas At Hogwarts". En effet, il a rejeté la chanson "Deck The Halls" voulue à la base, trouvant que c’était un non-sens complet que de mettre une chanson moldue dans le monde des sorciers (on a évité un beau faux-raccord grâce à lui ^^).


L’ensemble est dynamique, virevoltant, léger et permet à chaque mouvement d’être identifié dans la musique par un procédé orchestral poussé qui se rapproche du mickey-mousing (le Vif d’Or, La Cape, …) sans en avoir la lourdeur, car elle préserve une fluidité des plus rares.


Et ultime preuve du perfectionnisme de l’ensemble, "Harry’s Wondrous World". Une musique composé en plus par Williams pour le générique, développant le thème de l’Amitié et du Quidditch permettant une synthèse de tout ce que Harry Potter peut proposer de meilleur harmoniquement (le thème de Harry avec l’ostinato festif joué au glock/flûte/hautbois est juste orgasmique).


Impossible de tout développer (et encore, je me limite vu le nombre de lignes qu’il vous a fallu lire pour arriver jusque-là) pour décrire cet monument de la musique dans son intégralité (là encore, version étendue à se procurer !), mais au moins juste assez pour faire prendre conscience qu’Harry Potter n’est pas que le "Hedwig’s Theme" : il est seulement son porte-drapeau officiel, à en croire ses reprises dans tous les autres opus et jeux dérivés. Une parfaite synthèse de tout ce dont Williams est capable dans ce genre, en faisant preuve d’une inspiration intarissable ; la référence indispensable à tout amateur de Bo et de musique tout court. Inoubliable !

Soundtrax
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le 28 juin 2014

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