Björk est islandaise.
L’Islande, une île gelée dehors et bouillante en dedans, volcanique et polaire, mélange naturel de tous les extrêmes.
Björk n’est pas islandaise par hasard : elle fonctionne comme son île.
On peut même parler de fusion physique et intellectuelle entre cette terre et sa prestigieuse indigène.
Björk aime à se promener seule, là où la lave incandescente attaque la glace épaisse. Au bord des chemins, les geysers, leur jaillissement intermittent, syncopé. Et puis le vent tournoyant.
Björk écoute, elle s’imprègne de ces bruits craquants, inexorables, irréguliers, amplifiés par la montagne.
Björk trouve que toute cette nature, tous ces éléments déchaînés, somptueux et inquiétants, c’est vraiment très techno.
Alors elle décide d’en faire le lit de son troisième album solo, Homogenic, son plus personnel, son plus ambitieux, son plus beau, son plus fort. Son chef d’œuvre.
Enregistré en grande partie en Espagne, en compagnie d’une formation à cordes islandaise et d’une équipe technique qui connaît bien Björk , Homogenic est une œuvre où l’air et le feu, l’eau et la terre sont omniprésents, homogeniquement liés, illustrés, suggérés, traduits...Un mariage extraordinaire entre la nature et la technique, entre l’électronique et les instruments traditionnels.
A peine quelques longueurs, quelques morceaux en demi-teinte de ci de là, presque bienvenus, comme des pauses nécessaires . Pour le reste, des envolées orchestrales divines, une rythmique extrêmement fine, et une performance vocale à couper le souffle : une force formidable et jubilatoire se dégage de l’ensemble. C’est magnifique.
Maintenant, si vous doutez, écoutez « Bachelorette », directement comme ça... Vous verrez.
Ecoutez ensuite « Joga ». Puis « Immature ». Et puis mettez « Hunter » et laissez se dérouler le disque en entier.
Le voyage est inoubliable, sensuel et rassérénant.
Björk est islandaise.
Elle est surtout une grande artiste, passionnée et sans concession.
Homogenic est sa plus belle illustration.