Dans le monde hyperactif de la musique synthwave, c'est parfois difficile de s'y retrouver, y'a tellement d'artistes avec des approches différentes du genre, c'est un peu le bordel.


Mais si y'avait une liste essentielle à établir du coté obscur du genre, on retrouverait facilement monsieur Perturbator en tête d'affiche, et pour une bonne raison, on a affaire à un des pionniers du genre, qui enchaîne tuerie sur tuerie et à atteint un level au dessus de (presque) toute concurrence sur The Uncanny Valley l'année dernière.



Moins satanique, plus dystopique



Non content de niquer le game en 2016, Perturbator se ramène en 2017 avec New Model, tchou tchou arrive le hype train, on appuie sur play, et dès la première écoute, y'a un truc qui cloche.


Mais pas dans le sens "oh c'est de la merde", dans le sens "oh fuck c'est pas pareil que d'habitude mais j'ai quand même le barreau".


Alors que The Uncanny Valley était l'équivalent synthétisé du Thrash avec des néons rose et bleu, New Model est plus complexe, avec des couches superposées, style gros pachyderme. Parfois limite atmosphérique, la couleur vire ici définitivement au même noir que la pochette.


Dans le fond, c'est toujours Perturbator, sa signature est toujours présente dans la plupart des sonorités et dans le niveau de maîtrise presenté, mais l'approche est résolument plus massive, avec des drops aux grosses basses bien saturées et des dissonances qui foutent le seum.


(Ça s'utilise toujours le terme "drop" ? J'ai l'impression de lâcher un commentaire sur UKF Dubstep en 2011 quand je dis ça.)




En intro, un "Birth Of The New Model" qui débarque avec ses petites notes comme des gouttes de pluie, le tout est assez aéré, puis on glisse progressivement vers le ton plus compact qui caractérise le reste de cet EP.


Puis arrive "Tactical Precision Disarray", qui avait servi de teaser a l'album depuis un bon moment, un morcif parsemé de beats bien sentis et de shifts de tempo qui étouffent. A ce stade, le point de non-retour est déjà atteint, on sait qu'on va se faire concasser le crane pendant tout l'EP.


J'ai malheureusement pas encore eu l'occasion de voir Perturbator en live, mais de ce que j'ai vu, sa maman ça doit faire mal quand ce "Tactical" montre ses dents.


On est libéré du tabassage l'espace d'une minute sur le final, avec un son beaucoup plus chaleureux, mais ça vire doucement a l'angoisse et arrive "Vantablack", un titre lent et posé, qui mise sur une voix et des sonorités creepy as fuck pour alourdir le son, au lieu de partir sur le combo classique vitesse/gros son. Le seul morceau non-instru de l'album sort son épingle du jeu, mais ne dénature pas avec le reste pour autant. Le ryhtme a ralenti un instant, mais on est toujours dans les rues poisseuses de la métropole du turfu.


"Tainted Empire" remet les thrusters en route et monte en puissance façon soulèvement des machines. Y'a un quelque chose de très industriel à plusieurs reprises dans ce morceau, comme si on s'était mangé un mur d'acier en plein dans les dents. Surtout vers la marque des 3 minutes : après une petite séquence synthé bien saucée qui libère le passage, on se fait fracasser la gueule par une descente de flics corrompus.


"Corrupted by Design" à un côté night-club du début de siècle, la encore, c'est vraiment la surprise au rendez-vous. Bien sûr, c'est Perturbator, on sait qu'on est pas la pour déconner, l'ambiance est pas au dancefloor, mais a l'inhalation de vapeurs nauséabondes. Avec pourtant pas mal de passages allégés en instru, l'effet est inverse, c'est encore plus pesant.


Et pour clôturer cet EP en bonne et dûe forme, un pavé d'environ 9 minutes qui témoigne du talent de Perturbator, un titre plein de revirements. Épique, mécanique, cinématique, qui fout la trique. "God Complex" prend le temps de s'installer et nous en fait voir toutes les couleurs et met un terme à New Model en beauté. Enfin, toute les teintes de noir pour le coup. Vous comprenez l'idée.



Pushing the enveloppe



C'est assez chelou à expliquer, on explore vraiment le malsain du délire Cyberpunk. Alors oui, Perturbator c'était déjà pas bisounours & co. d'habitude, mais la on est au fond de l'égout.
Le délire cheesy/série B habituel de la vague s'efface pour nous mettre devant un truc plus sérieux, limite flippant.


Avec New Model, on est passé de Friday the 13th genre "ahah ça fait peur mais ça reste goleri" au premier Alien, où la réaction se passe de mots, laissant place à la tension.
Je sais pas si l'analogie résonnera personnellement avec vous, mais c'est l'esprit.


Perturbator fait un pas vers une nouvelle direction, qui divisera peut être certains de ses auditeurs, qui pourraient lui reprocher d'être un poil indigeste, ou pas assez "retro".


Mais pour moi, New Model dénote avec brio une volonté de faire évoluer l'artiste, et peut être pousser une partie de la mouvance darksynth vers de nouveaux territoires, d'où le titre de cette critique.




Ok, je sais pas si dans l'absolu je le mettrais au dessus de Uncanny, mais c'est tout autant une poutre, juste dans une direction différente. Cet EP est clairement une des oeuvres les plus abouties de James Kent, zero filler, que de la pure frappe.


Comme Reign In Blood, il faut a peine plus d'une demi-heure pour en venir à bout, mais le plaisir procuré et l'impact (j'espère) de cet EP valent bien plus que ça. Et quand je commence à faire des parallèles avec Slayer, c'est que je suis emballé.



TL;DR



9. Fuck it. On est à la mi-Décembre, j'ai eu le temps de le digérer, et je pense pas trop changer d'avis sur ce coup là. Même si je découvre d'autres albums coup de coeur rétroactivement, New Model devrait rester au moins dans mon top 5 2017.

PfzBlacky
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le 13 déc. 2017

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