Presence
6.9
Presence

Album de Led Zeppelin (1976)

C'est l'album de Led Zeppelin que préfère Jimmy Page.


Le disque commence par l'un des meilleurs titres de rock de tous les temps : Achille Last Stand, l'un des morceaux les plus emblématiques du Zeppelin, sommet de rock bouillant de plus de dix minutes qui finalement s'avèrent trop courtes. C'est un tourbillon de notes saccadées, nerveuses, acérées, rigides, une vraie tempête d'un authentique rock'n roll, le tout structuré par une batterie implacable, majestueuse et pachydermique. En introduction, le va-et-vient des arpèges guitaristiques de Page et la gravité du riff qui suit sont indissociables de la période sombre que vit alors le groupe : l'accident de voiture de Robert Plant survenu peu de temps avant et plus encore le fait qu'il ait frôlé la mort ont engendré ce monstre électrique, véritable bombe heavy metal résonnant d'une fatalité accablante, gorgée d'une énergie fiévreuse, foudroyante, de l'absurdité et du non-sens de la vie qui, bien qu'emplie de créativité et surtout de plaisirs charnels, peuvent s'arrêter à tout moment. En gros, le groupe a fini de rigoler. Au premier tiers du morceau, après plusieurs refrains ténébreux, le pont agit comme un véritable couperet : orchestré d'une main de maître, le riff de Page, magnifiquement accompagné par la lourde batterie de Bonham, sonne comme une sentence, une phrase de guitare hachée et fulgurante, qui par sa rapidité semble anticiper le trash metal à venir.


Le solo qui suit cette première partie déjà inoubliable est d'une rare intensité : Page, malgré l'urgence qui caractérise le morceau, prend le temps de poser ses notes, de les charger en émotion, en énergie libératrice, pour une fois il n'étale pas ostensiblement sa dextérité. Mieux, il se montre plutôt économe (tout le contraire du solo de Heartbreaker où il est effrayant de virtuosité et de cabotinage tout en restant génial), préférant jouer les notes justes, donnant l'impression de détricoter ou de ralentir le riff central du morceau pour mieux relancer celui-ci. Véritable locomotive, « Achille Last Stand » se classe à côté des autres morceaux les plus prestigieux du groupe que sont « Kashmir », « Stairway To Heaven », « When The Leeve Breaks » et « In My Time Of Dying ».


Et après ça, me direz-vous ?


La suite est plus qu'honorable, même si le groupe joue tout de suite son atout en positionnant ce titre dinosaurien en tête de gondole. Mais les autres titres ne sont pas dénués d'un certain charme, même si cet Achille sans talon les dépasse d'une bonne tête, ils ont le mérite, par leurs structures respectives, leurs orchestrations, les solos dont ils sont pourvus, et leur bonne facture globale, de participer pleinement à la cohérence de l'album. Avec le recul, tout de même, les morceaux donnent l'impression de tous se ressembler et en fin de compte, il y a "Achilles Last Stand" et les autres.


"For Your Life" souffre la comparaison avec "Achilles", mais est plein de bonnes idées : toutes les parties sont de vrais récitals de rock un peu funky, où la basse très ronde de Jonesy fait merveille. Son jeu de basse, très mésestimé, est pourtant, à bien des égards, la colonne vertébrale du groupe.
Le titre qui s'en tire le mieux après Achille Last Stand est sans aucun doute « Nobody Fault But Mine », plein de caractère, plus optimiste et plus blues que son ainé. A l'instar de "Royal Orleans", il débute par un riff répétitif, très entêtant, que les musiciens s'amusent à répéter à l'envie.


C'est un bon album du Zeppelin, mais un album qui peut paraître mineur au regard des précédents chefs-d’œuvres du groupe, "2" et "4" en tête (et j'aurai aussi très bien pu rajouter "1" et "3" tant qu'à faire...) ; je comprends la note globale, on parle bien d'un 7/10. Mais bon, que voulez-vous, quand on est un fanatique comme moi, on ne compte pas. Donc pour moi c'est un peu plus (8/10) avec même une petite recommandation.

ErrolGardner
8
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le 2 nov. 2015

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Errol 'Gardner

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