The foulest clique in the continent

Il est amusant de constater que plus le rap semble se rapprocher de la normalité (regardez Drake en 2014, même François Hollande peut le diss et s'en sortir indemne), plus certains rappeurs semblent au contraire basculer dans la surenchère en matière de violence, et notamment Vinnie Paz. Leader de Jedi Mind Tricks et forgeron de punchlines meurtrières dirigées vers les mauvais MCs, celui-ci a décidé de s'entourer d'un gang lui ressemblant dans ce super-groupe qu'est Army of The Pharaohs.

Et l'appellation d'armée n'est ici pas usurpée, et apparait même encore un peu faible. Respecter les conventions internationales concernant les prisonniers ? Mais quels prisonniers ? On parle ici d'un massacre généralisé, où femmes et enfants ne sont pas épargnés mais constituent plutôt des victimes de premier choix. Une bande de mercenaires armés jusque aux dents, se déchainant pendant plus d'une heure et 16 tracks. Pas de respect et d'honneur samouraï dans la lignée du Wu-Tang (contrairement à ce que pourrait laisser penser le titre de la première chanson, Draw Your Swords), mais plutôt une bombe sale à l'anthrax. La première cible de leur croisade ? Toujours les "wack MCs", les faux rappeurs qui ont vendu leur cul et leur intégrité à l'industrie du disque, et autres "fake niggas", dans une oeuvre qui tend à ressembler à une épuration ethnique balkanique par son ultra-violence et son côté anarchique.

Alors certes, l'album n'est absolument pas parfait, ça ne rappe pas vraiment toujours de façon incroyable, mais pourquoi sans soucier ? Leur flow est un lance-flammes, certes peu précis mais au dégâts intenses, et peu importe la qualité de leur lines, celles-ci semblent toujours partir comme des roquettes, "Seven" ressemblant plus à un orgue de Staline qu'à un morceau de rap (la verse de Demoz sur sa mort dans un attentat-suicide est complètement folle). Et même les off-beat, ne sont-ils pas ici au rap ce que les dommages collatéraux sont aux bombardements, un phénomène non-voulu mais qui fait tout de même mal ? Au final peu importe la technique, la présence du régiment de rappeurs sur chaque track suffit à assurer le spectacle.

Réaction radicale face à l'ensemble du rap game, Vinnie et sa troupe de psychopathes tabassent l'auditeur et lui roulent dessus. Rustique, radical, toujours présent, l'AK47 du rap, c'est Army of the Pharaohs !
Gweilo
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le 23 déc. 2014

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