Ambitieux album-concept, The Dark Side of the Moon occupe une place singulière dans l'histoire de la musique. Jusqu'en 1973, Pink Floyd rencontrait déjà un certain succès au Royaume-Uni et en France (notamment grâce au réalisateur Barbet Schroeder) et se distinguait par leur musique psychédélique voire étrange ainsi que par une scénographie toujours élaborée, aux couleurs vives, presque saturées. Largement amorcé par les deux opus précédents, Meddle et Obscured by Clouds, le son ''Pink Floyd'' devient plus rythmique, plus accessible sans pour autant rechercher une quelconque facilité.


The Dark Side of the Moon a la particularité d'avoir été joué en concert bien avant sa sortie officielle en 1973. Cette pratique, courante à l'époque, permet au groupe de peaufiner les morceaux et de les confronter à la réaction immédiate du public. Ce dernier semble conquis, subjugué par la beauté musicale de cette nouvelle création. Pink Floyd décide donc d'enregistrer, ce qui deviendra leur huitième album, aux studios d'Abbey Road. Comme à l'accoutumée, les paroles sont de Roger Waters, bassiste et chanteur, tandis qu'il partage la tâche musicale avec le guitariste-chanteur David Gilmour et le claviériste Richard Wright. Fait important : Les plages audio sont toutes reliées entre elles, donnant l'impression d'écouter une seule chanson.


The Dark Side of the Moon s'ouvre sur un court instrumental intitulé ''Speak to Me''. Composé essentiellement de bruits, le fond sonore est celui de battements de cœur. Symbolisant une naissance, l'album suit un seul et même concept : la vie et la mort. Première ''vraie'' chanson, ''Breathe'' est typique de l'univers sonore floydien. Introduction lente à la guitare slide, le morceau prend toute son ampleur avec le chant absolument sublime de David Gilmour. Court et simple, ''Breathe'' est une chanson puissante, musicalement et vocalement magnifique. L'instrumental qui suit est peut-être le moment le plus étrange de l'album. ''On the Run'' est en effet constitué d'une bande sonore électronique, métallique. Les prémices de la techno sont déjà présents, aucune structure musicale n'est présente, les instruments y sont trafiqués (notamment accélérés) pour former un ensemble atypique.


Le morceau suivant est un sommet du répertoire de Pink Floyd. 7 minutes de pure beauté. ''Time'' s'ouvre sur des sons d'horlogerie, réglés au millimètre par le groupe, puis enchaîne avec des percussions de Nick Mason simplement grandiose pendant environ 2 minutes. La voix de Gilmour éclate, son timbre unique étant une raison à elle seule d'écouter Pink Floyd. Le refrain, à la tonalité plus calme et entouré de chœurs féminins, est quant à lui chanté par Richard Wright (chose inhabituelle qui ne se reproduira uniquement qu'en 1994). Le solo de guitare est immense, rempli de virtuosité et de majesté. La chanson se termine en apothéose par une reprise de ''Breathe''. Le morceau suivant s'intitule ''The Great Gig in the Sky''. La base musicale ayant été trouvé, le groupe cherche une voix féminine pour illustrer la piste audio. Clare Torry est donc choisi pour effectuer une improvisation sur le thème de la mort. Elle délivre ici une performance hors norme presque orgasmique. Les vocalises sont envoûtantes, parfois déroutantes mais toujours d'une grande sensibilité.


''Money'', cultissime chanson, ouvre ce qui était à l'origine la face B. Premier succès commercial des Pink Floyd aux Etats-Unis, la chanson atteint la treizième place dans le Billboard 200. On retrouve ici des valeurs chères au groupe : les déviances de l'argent, le rejet du capitalisme entre autres. Ligne de basse légendaire, bruit des tiroirs caisses, voix agressive et rauque de David Gilmour, solo de saxophone admirable, Money est un classique, un long morceau entêtant, devenu un hymne pour toute une génération. La prochaine chanson, ''Us and Them'', résonne par sa tonalité jazzy (piano et saxophone tous deux divins) et une atmosphère particulièrement calme et planante, cependant rapidement brisée par un refrain dynamique, tout en puissance. La magnifique partition vocale (David Gilmour est décidément un immense chanteur) et la maîtrise musicale parfaite font de ce morceau un pur moment de bonheur.


Troisième et dernier instrumental de l'album, ''Any Colour You Like'' est un étrange collage de synthétiseurs et de guitare électrique. Il en ressort un son très psychédélique, expérimental, difficile à l'oreille mais toutefois intéressant. Les morceaux suivants (ils étaient diffusés ensemble à la radio), écrit et chanté par Roger Waters, sont l'apogée de l'album. ''Brain Damage/Eclipse'' forme un magnifique chant d'adieu. On y entend notamment la fameuse phrase : ''I'll see you on the dark side of the moon''. C'est tout simplement le plus beau moment de l'album. Le tout évidemment entouré de chœurs féminins. Sublime.


Succès planétaire lors de sa sortie, The Dark Side of the Moon se vend à plus de 45 millions d'exemplaires (troisième meilleur vente de tous les temps). Il est aussi 591 semaines consécutives dans le Billboard 200 américain soit 11 ans. La pochette est entrée à son tour dans la légende, ce prisme maintenant gravé dans l'imaginaire collectif.

emilesdl
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le 28 déc. 2016

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