The Stone Roses viennent tout droit de la même scène britannique "Madchester" pop/rock et orientée vers la danse que des groupes comme Primal Scream (bien que venant de Glasgow) ou les Happy Mondays, mais ils ne tombent pas dans le piège des sons tendances à l'époque et démodés aujourd'hui comme cela a pu arriver aux deux autres groupes, car ils font voler en éclats la musique du moment pour créer celle qui sera la bande-originale des Nineties. Ce sont les débuts de la Britpop qui sera portée plus tard par des groupes comme Blur, Pulp, ou évidemment Oasis. Cet album fut un changement de paradigme décisif, et plus de 25 ans après sa sortie il sonne toujours frais et nouveau alors que ses contemporains sont devenus un peu délavés, usés même (sans être mauvais pour autant). La ligne de basse lumineuse de I Wanna Be Adored et les mélodies étincelantes à la guitare sont sans aucun doute influencées respectivement par les Pixies et The Smiths, et le chant insistant bien que plein de classe de Ian Brown améliore encore un esthétique qui deviendra le fondement de la scène musicale indépendante britannique des 90's qui s'imposera brutalement dans le monde entier.
La principale caractéristique de l'album The Stone Roses est son côté psychédélique: un éclat brillant de lumières éblouissantes (oui, tout ça), un chant en écho comme situé à mi-distance, un tempo dansant mais posé allant de pair avec les cascades d'une guitare cliquetante. Les distorsions et le brouillard ambiant arrivent directement de la psych-pop version Sixties et s'adressent à la génération post-acide, amphétamines et ecstasy de la décennie 90 en glorifiant paresseusement le plaisir de la chair et l'érotisme sensoriel. Il y a dans chaque titre un son presque trop riche (à l'exception de l'interlude Elizabeth My Dear aux airs de Simon & Garfunkel) avec un bourdonnement constant et un brassage en profondeur. Que ce soit dans la douceur jazzy de Shoot You Down ou le power-chord massif de This is the One, la production suinte une profondeur acoustique permanente.
La version du 20e anniversaire de l'album contient en plus le single (ô combien essentiel, probablement une de leurs meilleurs chansons) Fools Gold dans sa version intégrale de dix minutes de bonheur. C'est une piste résolument plus dansante que le reste de l'album mais également avec ce côté à la fois cool mais détaché, presque froid, typique du groupe qui est plus développé ce qui la rend plus moderne encore que les autres. L'album inclut aussi un disque de "lost demos" avec des titres qui n'ont pas été jugés assez bons pour figurer sur l'album d'origine et certains qui n'étaient que sur des versions alternatives. Ces titres sont intéressants (surtout Elephant Stone) bien que clairement inférieurs et avec une qualité de son un peu au rabais, sans être scandaleuse pour autant.
Pour finir, je recommande chaudement le documentaire The Stone Roses: Made of Stone réalisé par Shane Meadows, consacré à la reformation du groupe, et qui est un vrai plaisir.
http://www.senscritique.com/film/The_Stone_Roses_Made_of_Stone/9102420
{S'il ne fallait garder qu'un titre}: Made of Stone, parce que c'est ma chanson préférée des Stone Roses après Sally Cinnamon qui n'est pas sur l'album et que je fais ce que je veux.