Tony Joe White
7.3
Tony Joe White

Album de Tony Joe White (1971)

Après être né, puis avoir grandi en Louisiane, Tony Joe White aura élevé la Swamp Music au rang d'art, ce style de musique poisseux, mêlant blues, rock, soul, country, Americana ou encore boogie avec l'impression de sortir tout droit des marais des profondeurs américaines.


Compositeur de génie, chanteur à la voix de velours, guitariste et harmoniciste extraordinaire, il s'est tu en 2018 mais laisse un immense héritage à la musique. Parfois plus connu pour son travail envers d'autres artistes ou les reprises qui ont été faites de lui (Joe Dassin ou Halliday chez nous, ou Elvis, magistralement, à l'international mais aussi Rory Gallagher, Ray Charles, Dusty Springfield ou Tina Turner (qui le croyait noir)) que pour ses propres albums, ce sera resté un homme simple toute sa vie, qui va privilégier sa vie de famille plutôt que la musique, sortant de temps à autre un disque puis une tournée.


C'est en découvrant et écoutant Lightnin’ Hopkins que ce fils de métayer va avoir ses révélations musicales, s'y consacrant jusqu'à la révélation en rencontrant les musiciens du fameux studios Muscle Shoals en 1969, sortant ainsi son immense premier disque, Black and White, après 4 singles infructueux. Plein de sagesse, il dira, dès la première chanson de ce disque Willie and Laura Mae Jones, sa façon de vivre, à l'image de sa perception de la couleur de peau, qu'on n'a pas le temps d'y penser lorsqu'on travaille la terre.


When you live off the land,
you don't have the time to think,
about another man's coulour.


Après ça il enchaîna avec deux autres albums remarquables, encore pour Monument, avant d'entamer un nouveau départ avec la Warner. Nous sommes en 1971, il enregistre alors son quatrième album à Memphis avec de nouveaux musiciens et producteurs, jouant à nouveau son style swamp si particulier qu'il va, cette fois-ci, mêler à quelques ballades soul. La production se montre à la hauteur et sublime ces deux aspects, mettant bien en avant la guitare et la voix de Tony Swamp Fox Joe White. Celui-ci continue de se perfectionner, il est serein et ça se ressent, tant dans son jeu que l'écriture où il y évoque la vie, sa famille ou encore son pays, en étant toujours inspiré.


La superbe photographie avec sa fille lorsqu'on ouvre le 33 tours est le symbole d'un Tony Joe apaisé.


You've got me in between
The devil and the deep blue sea


Il commence fort avec They Caught The Devil and Put Him in Jail in Eudora, Arkansas, nous met de suite dans l'ambiance avec le riff de guitare, puis l'harmonica, puis les cuivres et ses bruits caractéristiques. Tout est parfait, l'album est lancé et Tony Joe est au top, et il continue sur cette lancée avec The Change et sa guitare mystérieuse avant que My Kinda Woman renoue avec un côté plus soul, avec un clavier (comme sur l'ensemble de l'album) très présent. L'atmosphère de l'album s'adoucit avec The Daddy, ses jolies et fortes paroles ainsi que sa mélodie qui l'est tout autant, sans être mièvre. Black Panther Swamps termine la face sur un rythme plus relevé, où il sublime cette ode à la liberté avec sa voix mais surtout sa guitare électrique, superbe tant dans le solo que dans le feeling et la technique.


And the groove is knocking me out


La jolie et calme Five Summers for Jimmy lui permet d'entamer en douceur la seconde face alors que la géniale A Night in the Life of a Swamp Fox reprend un son swamp parfait et entraînant, Tony Joe White y est inspiré et livre l'une de ses meilleures chansons. Traveling Bone assure la continuité dans ce style avec une parfaite alchimie entre clavier et guitare, alors que I Just Walked Away puis Copper Kettle, deux ballades, apportent une réelle douceur, en particulière cette dernière, sublimée par l'harmonica et l'orgue. Ce sont les cuivres qui ouvrent la conclusion Voodoo Village pour une touche plus soul et qui bouge, permettant aussi à Tony Joe White de peaufiner son jeu de guitare si particulier.


Il n'y a aucune chanson faible et trouve la voix qui va le suivre jusqu'au bout, cette alternance entre un rock swamp et des ballades plus soul. Ce sont les premières citées qui marquent plus, il est difficile de rester assis en écoutant Black Panther Swamps, A Night in the Life of a Swamp Fox ou le groovy My Kinda Woman, son sens du rythme et du boogie est merveilleux. Enfin, ses talents de songwriters n'étant plus à prouver, les chansons moins rugueuses n'en restent pas moins réussies, avec quelques pépites comme The Daddy et l'émotion qui se dégage tant des paroles (d'une grande justesse sur la paternité) que de la musique, ou la mélancolique I Just Walked Away.


Quatrième disque et premier avec la Warner, Tony Joe White permet au Swamp Fox de trouver un équilibre entre son style swamp atypique et des ballades soul inspirées. L'atmosphère est surtout authentique, avec un soupçon de mélancolie et en fermant les yeux on se retrouve dans sa Louisiane natale, aux côtés des marais, de la terre pour un remarquable, parfois bougeant et agréable voyage musical.


Face A :


They Caught The Devil and Put Him in Jail in Eudora, Arkansas
The Change
My Kind of Woman
The Daddy
Black Panther Swamps


Face B :


Five Summers For Jimmy
A Night in the Life of a Swamp Fox
Traveling Bone
I Just Walked Away
Copper Kettle
Voodoo Village

Docteur_Jivago
8
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le 8 févr. 2021

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Docteur_Jivago

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