L'oxymore le mieux choisi du monde

C'est rare que je sorte la tête d'une BD avec le cerveau retourné et l'impression vaseuse que quelque chose a changé en moi. C'est sûrement à cause de cette si forte impression que j'ai noté Jolies Ténèbres avec une telle frénésie.
La couverture laisse entrevoir un univers très léché visuellement, à la limite de la fantasy peut-être... et sur les pages, on se retrouve face à un style carrément plus enfantin, les couleurs gaies nous frappent les mirettes, et les deux premières planches suscitent la perplexité.
Une petite fille, Aurore, et son prince qui prennent le thé, quand soudain les murs s'écroulent. Dans leur fuite, ils trouvent une ouverture qui... n'est autre que la narine d'une petite fille morte.
Toutes les créatures de son imaginaire prennent la fuite hors de ce corps mort, et tentent de survivre sous la houlette bienveillante d'Aurore, qui tente de bien faire mais ne peut pas prémunir ses camarades qui, oscillant entre l'innocence et la cruauté, se tuent les uns les autres sans jamais vouloir être mauvais, ou sont tout simplement éliminés par la nature et ses nombreux dangers. Je n'en dis pas plus, car le scénario n'est pas riche non plus, mais les scènes d'interactions entre les personnages et le destin d'Aurore nous offrent un condensé pur de ce qu'est, finalement, l'enfance.

De bons sentiments, de mauvaises actions, et toujours, cette impression que rien n'est grave.
Même quand le résultat plonge tête la première dans le morbide.
Je conseille ardemment la lecture de cette BD, qui est une expérience à part entière.