Ca donne quoi un super-héros dans la vraie vie ? Ce pitch de départ de Kick-Ass est aussi éculé que rempli de potentiel. Concrètement, y a moyen de faire n'importe quoi avec ça. J'ai assez apprécié le film (les films, plutôt, même si le second est clairement moins inspiré, il a ses quelques fulgurances de temps à autres), et du coup ça fait un bout de temps que je pense m'essayer au comic book. Alors...
Dave Lizewski (chai plus si c'est ça, j'ai sorti un nom en ski de ma tête, on va dire) est un ado comme les autres, moyen en tout, qui n'a rien de bien ou de mal pour lui. Si ce n'est cette passion pour les super-héros, et cette idée fixe qui lui trotte peu à peu en tête : devenir le premier vrai super-héros. Sans pouvoir, mais doté d'une soif d'émotions fortes qui confine au suicidaire, armé de matraques, il parcourt les rues, et quand il en réchappe plus ou moins entier, inspire la vie de ceux qui l'entourent. Jusqu'au moment où il croise la route de Hit-Girl et Big Daddy, deux héros, une petite fille et son père, qui chassent le mafieux suite à la mort de la mère de Hit-Girl qu'ils cherchent à venger. Les deux psychopathes ne reculent devant rien pour mener à bien leur mission... Peu après, Kick-Ass croise la route d'un autre héros, le mystérieux Red Mist, qui fait très vite parler de lui grâce à des coups d'éclats. C'est véritablement tout un mouvement qui se crée dans le sillage de Kick-Ass...
Si quelques idées folles du film sont absentes (Big Daddy qui est fuckin' Nick Cage et qui se trimballe habillé en Batman, par exemple), le talent des deux auteurs donne une couleur toute particulière à cette mini-série. Romita Jr., une des légendes du comics aux côté de son père, soigne aux petits oignons son style si caractéristique, superbement aidé par une colorisation au poil, notamment. Tout est dans l'organique et le mouvement, et les costumes peinent à cacher la physionomie de ces personnages tous dramatiquement banals. Ce n'est pas tellement le gore qui caractérise Kick-Ass, mais plutôt justement cette chair en mouvement, qui transpire de sous les fantasmes et les idéaux de tous ces protagonistes qui cherchent la transcendance des récits épiques.
Millar livre lui aussi un récit très soigné, quelques dialogues réussis, et surtout une peinture drôle et stupide de la société américaine à travers ses marginaux. Une des vraies bonnes idées du comics qui me semble essentielle et qui n'a pas été reprise au film donne selon moi beaucoup de valeur à cette version :
Le fait que Big Daddy soit un pur affabulateur psychopathe qui a entrainé sa fille pour devenir une meurtrière juste parce qu'il ne sait pas quoi faire de sa vie et qu'il a la trique en jouant avec des flingues, l'image parfaite du vigilante américain convaincu d'être le Punisher et qui n'est rien d'autre qu'un gros beauf dégénéré. C'est la petite touche de nihilisme, le petit moment de la carrière de Kick-Ass qui lui fait vraiment toucher le fond : même si les super-héros pouvaient être badass dans la réalité, ils seraient certainement avant tout des gros cinglés. Rajoutons à cela la "red pill", manifestement juste remplie de coke, l'arme secrète que son père donne à Hit-Girl pour les situations désespérées, et on tient le prix de papa du siècle pour cet incroyable déchet
Pour autant, Kick-Ass laisse un peu sur sa faim, ratant quelques envolées, se bouclant un peu vite et reposant sur quelques ficelles de narration un peu trop éculées.
Mais c'est cool. Franchement, y a un truc très cool qui se dégage de tout ça.