[Critique des 2 tomes, sans trop de spoils]


Pierre Dubois se considère comme un elficologue, soit un observateur du petit peuple que sont les lutins, elfes ou autres fées. Il est un auteur qui a largement contribué au retour de l'interêt en France autour de ces créatures : Ainsi, au fil de ses nombreux écrits, il dit avoir été inspiré par les écrits nommés Pétrus Barbygére, à savoir Pierre le barbu. Ce personnage étant bien sûr de fiction, Pierre Dubois, a donc décidé de lui donné vie en 1996 via une bande dessinée en deux tomes, accompagné du dessinateur Johan Sfar, à qui l'on doit aussi, entre bien d'autres, la série des « Donjon », des petits et grand Vampire ou encore du chat du rabbin.
L'histoire est donc celle du dénommé Pétrus Barbygère, elficologue de son état, qui va s'engager dans une quête pour sauver l'ensemble du petit peuple du royaume de Féerie des griffes de l'infâme pirate Reddy Scarlett, qui les a enlevés afin d'en faire des créatures de cirque. L'infâme gredin détenant le livre des Alfs noirs lui permettant de faire appel à la magie, Petrus n'est pas de taille seul : il se verra rejoindre par un membre du petit peuple de la race appelée Fion, du maître gastronomique Gérine le Gehennec de Treffendel et surtout, de la Némésis de Pétrus, le commandant du Navire le Hollandais Volant, à savoir Le Capitaine des Morts.
L'histoire, comme vous l'aurez sans doute remarqué, n'est pas très complexe : il ne s'agit là que d'une succession de quêtes et d'aventures pour rattraper le scélérat Reddy Scarlett. Mais ce qui donne un peu de piquant et de sel à ces aventures sont le caractère et le phrasé de nos protagonistes, qui, lui, est haut en couleur. Notre héros, Pétrus, est un Gargantua, par exemple : Un grand homme à l'énorme ventre, que l'on devine d'une culture humaniste et qui ne manque de sortir de bons mots argotique tel « margnouffle », « popeligne » ou encore « Roidement ». De même, il ne manque pas d'humour, aimant sortir de temps à autre Calembours, jeu de mots ou autres contrepèteries. Tout le contraire du Capitaine des Morts, qui est lui, sans jeu de mot aucun, sérieux à en mourir, mais tout aussi cultivé et intelligent. La plupart de l'intrigue prend d'ailleurs place sur le hollandais volant, avec un équipage de morts-vivants, dont notamment un oiseau squelette assez intriguant.
La Mort, justement, prend une grande place dans ce récit : elle est déjà amplement présente dans l'équipage rencontré sur le navire – un équipage qui cherche d'ailleurs de prime abord à dépecer les vivants avant tout autre chose. On la retrouve aussi dans le sort réservé aux ennemis, qu'il soit Davy Jones, le Kraken ou encore Reddy Scarlett lui-même, dans une fin d'ailleurs très sanglante, avec une partie du visage arrachée avec les dents. Et enfin, elle n'est jamais plus présente que dans le Capitaine des Morts, aussi appelé le croquemitaine d'écume.
Les dessins de Sfar sont magnifiques et fabuleux, comme à son habitude, et se permettent de nombreuses ambiances, que ce soit des passages oniriques, comme avec la proue du bateau Camarilla, d'autres passages plus lovecraftiens avec l'antre du hollandais volant le cloaque de la pieuvre ou le Kraken ressemblant presque trait pour trait au fameux Ch'tulluh : on retrouve même des passages extrêmement épiques, comme le combat final, pratiquement muet, ce qui est rare dans un livre autrement verbeux en toutes circonstances. L'on peut donc, vous l'aurez compris, retrouver dans cet ouvrage de nombreuses références : il y a bien sûr le Ch'tulluh de Lovecraft, mais également Shakespeare, Mary Shelley et même Tolkien présent en chair et en os dans le récit.
Pour conclure, Pétrus Barbygére n'est pas un chef d’œuvre du neuvième art, loin s'en faut. Mais si vous cherchez un univers dépaysant, une verve rabelaisienne et des dessins magnifiques (Sfar oblige), vous avez sans doute frappé à la bonne porte.

Disclaimer : Cette critique a d'abord été écrite pour Radio Campus Grenoble.

Sn_Parod
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le 10 avr. 2015

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