L'eau est partout dans l'album L'Oreille Cassée (remarquez que les bandits n'écoutent jamais Tintin qui jure pourtant ses grands dieux ne pas savoir où est le fétiche tout au long de l'album, ils ont à leur façon l'oreille cassée) : fontaine où tombe par deux fois l'aide de camp déchu Diaz, orage qui permet à Tintin d'échapper aux bandits, rivière où Tintin saute pour échapper aux balles nuevoricaines, rivière que suit Tintin avec Caraco, l'eau où Tintin surnage au milieu des piranhas, l'eau enfin où les 2 bandits coulent à pic à la fin de l'album. Chose très rare dans Tintin, petite perle: 3 diablotins joyeux emportent les bandits avec eux, les couleurs chaudes -voire criardes- de l'album donnant au dessin son style d'enluminure. Remarquez également que c'est le seul album où l'on voit Tintin... dans son bain ! L'eau est ici le fluide de l'aventure. A l'inverse, l'alcool est associé à l'oisiveté : la bière bue sur le transatlantique, l'aguardiente servant à patienter avant l'exécution, l'alcool que boivent les 2 bandits en fomentant un enlèvement, la boisson bue le temps d'une discussion dans l'hacienda : les scènes de boisson annoncent généralement les scènes d'action, où beaucoup de personnages, à commencer par Tintin, « boivent la tasse ».
L'eau vient donner la note finale, ponctue le récit à la manière d'un personnage, et elle est le dénouement de presque chaque moment d'action. A la baignoire, ce petit bain où Tintin entend pour la première fois parler du fétiche, à la page 1, répond le grand bain de la page 61.