La Favorite
7.6
La Favorite

BD franco-belge de Matthias Lehmann (2015)

Les apparences sont parfois trompeuses...

Avec ce récit en noir et blanc l’auteur nous plonge dans la vie tourmentée de la petite Constance, 10 ans. C’est elle qui prend en charge le récit.
Constance vit chez ses grands-parents dans une belle demeure d’un village de la Brie à la fin des années 70. Elle est enfermée dans cette prison presque dorée : son seul terrain de jeu, le jardin, avec interdiction absolue d’en franchir les limites. Son grand-père ? Un homme faible et alcoolique. Sa grand-mère ? Une vieille dame irascible qui oblige la petite, entre deux coups de fouet, à dormir au grenier. Son horizon va s’ouvrir quand ses grands-parents embauchent comme gardiens José et Alma da Costa. C’est à cette occasion que Constance va enfin pouvoir côtoyer des enfants de son âge.
Matthias Lehmann raconte l’histoire bouleversante de cette enfant et de ce secret qui se dévoile au fur et à mesure du récit. Le découpage narratif rajoute à la dramaturgie de l’histoire : aux pleines pages succèdent des strips, des gaufriers mais également des dessins qui s’épanouissent sur les planches comme pour montrer le besoin vital d’évasion de Constance, elle qui ne sort même pas pour aller à l’école, sa grand-mère s’occupant elle-même de son éducation.
Dès la neuvième planche, on comprend que quelque chose ne tourne vraiment pas rond dans cette famille quand Constance rêve d’assassiner ses grands-parents pour être enfin tranquille. Le trait de Matthias Lehmann fait penser à du Will Eisner : le dessin est hachuré, nerveux, tendant par moment vers du réalisme dans les décors ou se distordant à souhait jusqu’à la caricature des visages pour mieux mettre en avant le chaos qui peut régner dans la tête de l’enfant meurtrie. Ames sensibles s’abstenir ! Le propos peut être violent mais on se prend parfois à sourire et même à avoir des pointes de compassion pour les grands-parents.
Avec la Favorite, Matthias Lehmann signe un récit riche en émotions. Pourtant pas de pathos ici : on suit juste une enfant différente qui essaye de grandir et de se confronter aux autres toujours là pour lui renvoyer en pleine figure sa singularité. Avec près de 150 pages ce roman graphique pourrait être inspiré d’un fait divers mais ce n’est pas le propos. L’auteur s’est questionné sur le déterminisme social d’une époque.

BiblioTakeCare
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste 2015 en bulles

Créée

le 8 nov. 2015

Critique lue 357 fois

2 j'aime

BiblioTakeCare

Écrit par

Critique lue 357 fois

2

D'autres avis sur La Favorite

La Favorite
belzaran
8

Thème malsain & planches déconstruites

À force d’entendre du bien de « La favorite », j’ai fini par arriver à me le procurer. La bande dessinée de Matthias Lehmann proposait un parti pris graphique intéressant couplé à une histoire...

le 23 janv. 2016

6 j'aime

1

La Favorite
Ginkga_Biloba
8

Critique de La Favorite par Ginkga_Biloba

Le récit sombre et fascinant de la délivrance d’un enfant. D’une grande originalité autant graphique que scénaristique, un conte superbe, inattendu, et décapant ! Dans un petit village de la région...

le 13 août 2015

6 j'aime

La Favorite
Queenie
8

Derrière les ombres.

Constance, petite fille solitaire, vivant avec sa tante et son oncle dans un "château". Élevée "à la dure", par sa tante (son oncle préférant picoler tout seul dans le salon), elle se retrouve...

le 8 mars 2016

2 j'aime

Du même critique

La Variante chilienne
BiblioTakeCare
9

Du vin, des femmes, la vie quoi !

Ce roman ce n’est pas une histoire mais une constellation de morceaux de vies… Et quelles vies ! Pierre Raufast possède un réel talent de conteur comme le prouve les récits de Florin. Florin c’est un...

le 8 nov. 2015

3 j'aime

1

Le Monde à tes pieds
BiblioTakeCare
9

Portrait d'une génération sacrifiée

Le Monde à tes pieds ce sont trois histoires qui se suivent avec pour fil conducteur les désillusions d’une génération sacrifiée dans l’Espagne contemporaine. Le lecteur va d’abord découvrir Carlos...

le 19 juin 2017

2 j'aime