Post-apocalyptique et contemplatf

La terre des fils n'est pas belle à voir. Une sorte de déluge semble avoir transformé le monde créé par Gipi en un grand lac, une tourbière remplie de cadavres boursouflés. Un désert humide. À l'origine : probablement un désastre écologique. La thématique industrielle est assez présente, et les personnages évoquent de manière récurente un poison, qui serait dans l'eau, un peu partout.
Les survivants de ce désastre vivent isolés, sur des îlots ou des cabanes sur pilotis. Parmi eux, un homme élève seul ses deux fils dans la brutalité, pour les préparer à la dureté de ce nouveau monde.

Le motif post-apocalyptique de La Terre des Fils est plutôt réussi, sans être particulièrement original (il rappelle particulièrement le dernier Mad Max). Le monde est quasi-détruit par une pollution endémique (les radiations dans Mad Max, le « poison » de l'eau ici), la culture humaine est devenue complètement décadente (un groupe de survivants voue par exemple un culte ridicule, à une divinité du nom de « Trokool »), et les émotions elles-mêmes sont perverties (joie et amour apparaissent déplacés, malsains, comme une pâle imitation).

C'est l'ambiance qui bénéfice d'un traitement assez génial. La narration est très lente, le dessin en noir et blanc fait gribouillé, dur. De longs plans (façon de parler) fixent le ciel froid d'un environnement que l'on sent indifférent. Ses couleurs ont disparu, réduites à un gris uniforme, tout comme l'est la palette d'émotions des personnages. L'homme redevient sauvage. Il y a une fascination pour la connaissance, qui prend d'autant plus de poids qu'elle a disparu.

La Terre des Fils est un récit assez contemplatif, plutôt singulier dans le paysage de la bande dessinée. Son propos est peut-être moins important que son traitement, mais le résultat n'en vaut pas moins le détour.