Comme pour "Le haut est en bas et le noir est blanc", la première chose qui m'a frappé dans cet album, c'est le dessin. En mal. Je ne savais pas au premier abord ce que je trouvais le plus laid : le dessin ou la mise en couleur. En fait, je me suis rendu compte que le dessin est vraiment horrible mais que la colorisation numérique l'enlaidit, ce qui rend donc celle-ci moralement répréhensible en plus d'être déjà mauvaise. L'image est beaucoup trop sombre, et les nuances de couleurs faites à l'ordi, très artificielles, sont immondes. Heureusement, ça change dès le second numéro ; ça n'est pas vraiment beau, mais c'est quand même beaucoup mieux. Il y a une image vraiment bien en revanche, où un personnage tire, et n'est éclairage que par la lueur orange du coup de feu.
A noter sinon que Goran Parlov a dessiné la défunte Kathryn O'Brien et sa sœur de sorte à ressembler à Gillian Anderson.
La laideur du dessin au début m’a donné des difficultés à apprécier l’histoire, même si ça débute de façon plutôt intéressante avec Frank qui évoque un cauchemar récurrent, où sa famille est encore en vie. S’ensuit une séance d’entraînement où Frank énumère de façon ennuyeuse l’histoire des armes qu’il utilise, mais c’est nécessaire pour dire qu’il essaye de noyer ses pensées en se concentrant uniquement sur le tir.
Le thème au cœur de cette histoire est le fait d’être parent, la peur avec laquelle on vit constamment quand on a des enfants, la crainte de les quitter des yeux rien qu’une seconde en pensant à ce qui pourrait leur arriver en ce monde. Une peur qu’a connu Frank Castle 30 ans auparavant, et qu’il va connaître à nouveau quand il va devoir retrouver un enfant et le protéger de Barracuda.
On apprend d’ailleurs aussi quelles étaient les relations de ce dernier avec son père. Car effectivement, Barracuda revient, il n’est pas mort, ce qui est un total n’importe quoi pour moi, déjà que j’avais été pas mal déçu par l’album où il apparaissait. Mais là, je dois avouer que Garth Ennis exploite bien le personnage : il veut vraiment se venger de Castle, et pour cela monte un plan élaboré, bien badass, pour le piéger, et ensuite le torturer. Le faire souffrir physiquement ne suffit pas pour Barracuda, parce qu’il y a un moment où on se lasse des cris, forcément. Il a donc cherché comment le torturer autrement… et c’est énorme, Ennis livre une révélation renversante sur Castle, qu’on découvre en même temps que lui, au moment où Barracuda s’en sert contre lui.
Garth Ennis a des idées de scénarios géniales, par exemple quand Frank finit à l’hôpital, surveillé par les flics, il est libéré grâce à un médecin qui le méprise mais veut préserver le lieu d’un massacre de Barracuda.
A la fin d’un des numéros, l’auteur ose un twist putain d’audacieux, effrayant, tellement osé que j’espérais qu’il ne se passait pas vraiment ce qu’on croyait.
La lutte entre les deux adversaires est vraiment sans pitié, le Punisher se permettant des coups bas jamais vus : il électrocute les couilles de Barracuda, lui arrache le nez à la pince, c’est vraiment cru.
La violence est plus extrême que dans n’importe quel album du Punisher que j’ai lu, et les personnages, extrêmes aussi, sont carrément tarés, entre ce Frank Castle plus sauvage que jamais, et un Barracuda qui répète "I’m Barracuda", même quand son visage est en morceaux, cherchant désespérément à s’imposer comme si son nom signifiait encore quelque chose.
Malgré les défauts visuels, c’est un album au récit très puissant, aux idées et à la brutalité impressionnantes, et qui montre encore le Punisher sous un angle un peu différent.