Et une louche d’eau à la bouche, une !
Je déchire le papier, et voilà que je découvre le dernier Davodeau. En voilà une idée qu’elle est bonne, merci Papa Noel ! Le bandeau annonce la couleur : « « Le nouveau DAVODEAU ! Après « LES IGNORANTS », LE LOUVRE ! ». Bon, c’est un peu suspect, on verra bien.
Déjà, c’est un bel objet, cartonné, avec un papier de qualité, comme savent le faire les Editions Futuropolis. Sur le plan technique et visuel, c’est de la même qualité que Les Ignorants, voire au-dessus : c’est tout simplement magnifique, tant dans la représentation d’œuvres du Louvre que dans celles de gens ordinaires que Davodeau parvient habilement à sublimer. Avec un superbe parallèle entre les Cariatides et une femme somme toute ordinaire. Et des dessins plus beaux que nature, d’autant plus que Davodeau s’est concentré sur la statuaire, dont il rend habilement la sensualité, sans s’essayer à la reproduction de peintures ce qui eut été une gageure dans les petites cases d’une bande dessinée.
Ce qui cloche, c’est qu’on a là une histoire un peu louche, un scenario bien peu enthousiasmant qui ne casse pas trois pattes à un canard, ma foi. Ca n’est pas inintéressant, l’album pose de bonnes questions, mais il n’y a là rien de bien neuf. Frédéric Potet dans Le Monde affirme qu’« il y a du Banksy dans Etienne Davodeau ». C’est très exagéré, les démarches respectives des deux artistes n’ont rien à voir, même si Davodeau pose la question fort légitime de ce qui peut distinguer une simple croûte de ce qui serait un authentique chef d’œuvre. Comment faire la différence ? En est-on seulement capables ? Est-il possible d’avoir le recul nécessaire, quand on sait qu’à de nombreuses époques, les diktat d’une pensée dominante ont mis au rebut des œuvres qui méritaient sans doute bien mieux ? Comment distinguer ce qui peut entrer dans un musée comme Le Louvre de ce ne le mériterait pas ? La question est fondamentale, et si Davodeau la traite de façon humoristique, c’est en fait très banal, et pas très drôle. Et malgré son talent incontestable, il n’est pas évident d’adhérer à son histoire, peu crédible et superficielle : l’histoire d’amour est banale, les personnages peu creusés, et l’histoire de la République du Louvre finit platement. J’ai donc refermé l’ouvrage avec une pointe de déception.
Bref, un album qui serait largement dispensable sans les magnifiques dessins reproduisant des œuvres d’art. En fait, j’aurais largement préféré un carnet de dessin classique, non scénarisé… C’est vrai qu’un carnet de croquis de sculptures se vendrait moins bien. Davodeau vaut beaucoup mieux que cet album moyen. L’ouvrage donne toutefois envie de se replonger dans l’histoire de l’art. Ca n’est pas si mal.