Dunkerque, fin du XIXe. Les marins qui partent six mois pour la pêche à la morue. Un garçon, Moïse, surnommé le petit miracle, élevé par un couple de marins qui ne sont pas ses vrais parents. On l'a retrouvé bébé dans une barque découverte par Irma, une vieille folle. Il cherche ses origines, qui sont révélées dans la dernière case du livre.

La bande dessinée se clôt sur un cahier de quelques pages dans lesquelles Makyo explique à quel point il s'est inspiré de son passé familiale pour construire ce livre. Et Dieu sait que cette reconstitution du milieu des pêcheurs dunkerquois est faite avec réflexion est amour.

Le seul bémol portera, j'imagine, sur le graphisme assez académique : on aimera ou pas. Cela fait partie de la démarche de l'auteur, je pense. Car ce qui prime, c'est le propos. Et la France est assez forte pour faire ce genre de fiction historique sociale, mais il est rare que ce soit aussi réussi.

La quête d'identité de Moïse tourne autour de plusieurs personnages : Ernest Halma, son père adoptif, pêcheur de morue droit ; Worris, bourgeois dunkerquois et armateur, qui aimerait en faire son héritier ; Séraphin, auteur bohême qui vend des histoires écrites à la main sur la place du marché ; Xas, une brute malfaisante et alcoolique qui se trouve le neveu par alliance de Worris.

L'intrigue se décompose en plusieurs parties : une première partie suit Moïse avec sa bande de copains dunkerquois, qui jouent à divers jeux plus ou moins dangereux ; puis Moïse fait connaissance avec Raffaëlle, une des filles de Worris, et tous deux enquêtent sur l'identité de la mère de Moïse ; enfin, la dernière partie se situe sur un bateau de pêche à la morue, où Moïse a réussi à se faire admettre. Là se joue un combat contre les manigances de l'infâme Xas.

Et donc, la solution du mystère : la mère de Moïse, Léna, était une prostituée qui avait trois amants différents : Worris, Séraphin et Ernest. Mais elle fut violée un soir par Xas, puis tomba enceinte. Persuadée que l'enfant était de cette brute, elle alla voir Irman pour se faire avorter, mais la vieille folle n'en fut pas capable. Désespérée d'avoir cet enfant, peu après l'accouchement, Léna partit sur une barque avec lui. On ne sait ce qui arriva, mais la barque revint seule avec l'enfant. Cependant, à la dernière page du livre, Moïse retrouve la montre d'Ernest, son père adoptif. Une gravure d'Ernest enfant y est conservée, et l'on peut voir à quel point la ressemblance avec Moïse est frappante : Ernest était bel et bien le père de Moïse.

Il y a un vrai soin à dépeindre les petits détails de la vie quotidienne dans un port du Nord-Pas-de-Calais. L'argot est utilisé mais pas de manière artificielle je trouve. L'univers mental, à base de religion et de superstition, qui aide à faire face à des métiers si difficiles où l'on peut perdre la vie, est très bien rendu. Les situations sont prenantes, et l'on s'identifie bien aux différents personnages.

Le coeur en Islande est un hommage touchant de Makyo à sa ville d'origine, Dunkerque, et au dur monde de la pêche à la morue fin XIXe. Ce n'est pas larmoyant et c'est poignant comme il faut. Une belle histoire.

zardoz6704
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le 11 juin 2023

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