Le premier opus de la série, Le Secret de l'Espadon, était aussi stressant qu'intense, par son total côté apocalyptique. Le deuxième permet de se détendre un peu plus, car les enjeux sont d'une gravité bien moins extrême. Est-ce que l'on perd au change ? Non, on ne perd pas ou on ne gagne pas au change, on va juste vers un tout autre registre. Un registre qui est celui de l'aventure, mixé avec du policier et un bon petit soupçon d'occulte. Cela donne envie et c'est tout à fait normal.


Jacobs, quand il aborde un sujet, ne fait jamais les choses à moitié, ne parle jamais de ce qu'il ne maîtrise pas. On voit bien dans cet opus qu'il en connaît un rayon sur l'égyptologie. Il se permet même deux petits moments de pause, à travers une visite rapide dans le musée, où se déroule une partie de l'action, et à travers une promenade aux alentours des pyramides, de nous plonger dans la spécialité, pour qu'on ait un petit bagage culturel, pour que l'on ne soit pas perdu et donc pour que l'on soit aussi captivé que les protagonistes par la richesse du passé historique de l'ancien pays des pharaons. De plus, il n'adopte pas un point de vue de gros bourrin occidental, en prenant la culture du pays et ses anciennes croyances au sérieux (d'ailleurs, à lui tout seul, le personnage du Cheik Abdel Razek, aussi intrigant que sympathique, en est une belle preuve !).


Autant dire que cela donne un fond riche à notre histoire et aussi à la forme évidemment. Il ne faut pas oublier que la BD est un art très visuel et que le talent et l'imagination exceptionnels en terme d'images de Jacobs ne manquent pas d'être particulièrement inspirés par des lieux et un imaginaire s'y prêtant à merveille (il suffit de regarder les couvertures des deux tomes pour s'en assurer !).


Sur le plan de l'histoire, c'est rebondissement sur rebondissement, tenant en haleine le lecteur jusqu'au meilleur, la fin, qui se déroulera à l'intérieur de la fameuse pyramide du titre (d'ailleurs, on sent l'influence du classique fantastique Universal Pictures des années 1930, La Momie avec Boris Karloff, dans la manière dont elle est mise en scène !).


Cela va être dans un premier temps, Mortimer et... Mortimer, Blake ne faisant qu'apparaître que dans les dernières pages du premier des deux tomes de la BD ; ce qui ne va que rendre la présence de ce dernier encore plus fracassante. Je n'en dis pas plus. Pour Mortimer, il est efficace, est sans peur, parfois très perspicace, quelquefois un peu concon (non, Mortimer, quand on te sert un café que tu n'as pas commandé, tu ne le bois pas !).


Et on va avoir des moments comiques tout à fait bienvenus avec le docteur Grossgrabenstein, à l'accent allemand aussi énorme qu'un strudel géant.


Mais, bon, allez, le plus important, le monstre (dans tous les sens du terme !) de charisme de gros malade, le meilleur des antagonistes, celui qui vole la vedette à tout le monde, j'ai nommé Olrik. Le Secret de l'Espadon avait révélé un être sans le plus petit scrupule, diaboliquement rusé, incapable de ressentir le moindre sentiment humain pour autrui, ne servant que sa propre cause, mais aussi d'un courage physique et d'un sang-froid qui ne peuvent jamais être pris en défaut.


Là, on a la révélation d'un être surpuissant, qui a réussi à fonder une véritable organisation criminelle tentaculaire, redoutable. On comprend aussi que ce n'est pas du tout un big boss restant confiné dans sa tour d'ivoire et dont seuls les sbires se salissent directement les mains (il pourrait tout à fait, tel un Ernst Stavro Blofeld, se le permettre !). C'est quelqu'un qui a constamment besoin de sa grosse dose d'adrénaline, qui a constamment besoin d'être au premier rang dans la bataille. On finit même pas se demander si ce n'est pas l'excitation que lui procurent ses actes, beaucoup plus que les éventuels gains qu'il peut en retirer, qui le pousse à se comporter comme il le fait.


J'adore ce personnage et j'adore la façon dont Jacobs le développe tout au long de ses histoires, nous en expose de nouvelles facettes à chaque fois. Il est fascinant. À un tel point que la toute dernière case donne tout de suite envie de se jeter, comme un mort de faim, sur l'opus suivant (ce que j'aurais certainement fait si je ne l'avais pas déjà lu !), le fameux La Marque jaune, pour savoir ce qu'il devient.

Plume231
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le 20 janv. 2021

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