Ayant en tête l'amour des auteurs pour le cinéma des années 50-60, ce 44ème tome me rappelle étrangement l'ambiance que l'on pourrait avoir dans un film de Clouzot, plus particulièrement le Corbeau. La BD traite de racisme, oui, mais pas seulement : ce qui est réellement mis en avant c'est l'hypocrisie des gens en général. D'ailleurs il n'y a que très peu d'allusion raciste au final, à part l'une ou l'autre blague de Vito, on reproche aux gens d'avoir changé et non pas d'être d'une autre couleur de peau.
Le scénario rappelle la fin de "Les bijoux de la Castafiore" ou encore "Panade à Champignac" puisqu'il s'agit d'une 'aventure' à domicile. Les auteurs approfondissent toujours davantage le côté humain et réel de leurs personnages. Ainsi, s'il y a de l'action par moment et quelques gags absurdes, ça reste une histoire très plausible (à condition de croire en cette invention). C'est pas bête. il est seulement regrettable que l'on retrouve si tôt Vito Cortizone. Dans l'histoire en soi ça passe, mais quand on regarde la série sur la longueur, ça fait tout de même trois albums en suivant le mettant en scène, si l'on compte "Luna Fatale"). Surtout que le hasard fait trop bien les choses pour que ce soit justement à Champignac où nos amis sont présents quelques temps que le Don déchu soit emprisonné. Ce que je reproche, c'est, malgré une très bonne idée, un traitement un peu trop lisse : non pas que la thématique aurait dû sombrer dans l'anti-racisme pur, mais juste que certaines situations auraient pu être poussées plus loin, tout simplement. Car la thématique est en soi assez adroitement exploitée, les auteurs n'en font pas des caisses justement, et c'est ça qui est bon.
Graphiquement, Tome et Janry parviennent à renouveler le village que l'on a déjà visité tant de fois pourtant. les auteurs se le sont réappropriés avec aise, et se sont permis d'approfondir la faune locale. C'est finalement le récit le plus explicite quant à cette communauté que Franquin avait créé. Je me demande ce que ce dernier en penserait. Le découpage est assez efficaice, les auteurs, conscients que leur récit est très court, se permettent de prendre plus d eplace pour raconter des sentiments : ainsi, Spirou qui se rend compte des effets de l'accident prend une page entière ; c'est aussi l'occasion pour les auteurs de favoriser le silence aux explications trop envahissantes de bien des récits d'aventure. L'on onstatera que pour ce récit plus calme et minimaliste, les auteurs ont opté pour un découpage serein et plus discret..
Bref, "Le rayon noir" est un récit intelligent, calme, toujours plus différent de ce qui a pu paraître auparavant dans cette série. Il est simplement dommage que les auteurs n'aient pas été plus loin dans le traitement de certaines scènes qui, de ce fait, manquent un peu de mordant.