Les tentatives successives de Yves Sente de doter la série post-Jacobs d'une identité différente - en abandonnant les aspects fantastiques / SF des récits originaux, et surtout en centrant les histoires sur le professeur Mortimer dont on découvre progressivement la vie "intime" - peuvent être légitiment critiquées par les fans fidèles de la géniale série, mais ont au moins le mérite de se distinguer d'un modèle désormais bien usé. "Le Testament de William S." reprend cette démarche (pour la dernière fois ?) puisque la seconde partie du récit abandonne Blake à un rôle secondaire qui sert uniquement à faire avancer l'intrigue et à la résoudre finalement, alors qu'on assiste à la construction progressive d'une relation entre Mortimer et sa fille (relation ambiguë ?) au fil de péripéties aussi rocambolesques que molles sur les routes de l'Angleterre et de l'Italie. Mais la vraie curiosité de ce "Testament de William S." à vrai dire passablement ennuyeux - qu'il vous faudra, comme moi, fermer 2 ou 3 fois, avant d'arriver au terme de ses 62 looooooongues pages -, c'est l'aspect excessivement "Dan Brown" de cette recherche de documents historiques révélant la véritable identité de William Shakespeare, recherche construite comme une chasse au trésor internationale jalonnée d'énigmes cryptées et de mécanismes secrets. On peut apprécier ou non cet exercice, mais on se trouvera finalement plus séduit par l'histoire de ce singulier couple à trois qui est narrée par les manuscrits retrouvés : un peu plus d'audace quant à la description de la relation homosexuelle / bisexuelle évoquée ici n'aurait d'ailleurs pas fait de mal, puisque "le Testament de William S." s'adresse clairement à des lecteurs adultes ! Sinon, les raisons de critiquer ce livre ne manquent pas, entre un dessin terriblement rigide d'un Juillard qu'on jurerait en train de régresser, et des choix assez ridicules dans le scénario, comme la réutilisation fatigante d'Olrik, frisant ici le ridicule, ou le manque de crédibilité des épisodes tournant autour de la bande de "teddy boys" agressant le bourgeois dans Hyde Park. Bref, voici un livre par de nombreux aspects audacieux, mais qui ne tient pas ses promesses... [Critique écrite en 2016]

EricDebarnot
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le 10 déc. 2016

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Eric BBYoda

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