C'est une BD qui commence par la mort, l'absence, le manque. Ce qu'il reste d'une personne dans une vie. Ici, c'est Emma qui pleure Clémentine, qui ne lui a laissé que ses journaux intimes. Des journaux, tantôt naïfs, tantôt révoltés où elle se (ra)conte de ses années d'ados un peu paumée, à sa jeunesse. Nous n'avons de Clémentine que des esquisses, celle de la jeune fille malheureuse qui se cherche à travers ses échecs amoureux avec les garçons. Puis, celle de la jeune femme anéantie, qui ne comprend plus rien à ce qui lui est arrivé. On comprend les éléments éparses de sa vie, dans la vision de son enterrement: elle a été aimé fortement par un garçon, son erreur de jeunesse, elle a aimé son métier: professeur. Et surtout, elle a aimé Emma. On le sait, car ces trois entités participent à son enterrement, ce sont les souvenirs de sa courte vie.
Une vie de disputes avec son grand amour. Dispute parce que l'acceptation de l'homosexualité, du regard des autres, entravera la reconnaissance du début de la relation. Puis disputes car ce sont deux personnages en décalage, elles le disent dès le début "beaucoup de choses nous séparent". Et Clémentine, toujours se sent seule. Elle s'abandonne rarement, sauf dans les scènes d'amour, les actes charnels qu'elle vit avec Emma. Et c'est d'ailleurs dans un "orgasme mortel" (ce sont ses mots), qu'elle quittera Emma. Son coeur lâche, elle garde en mémoire son amour. Pour la BD, dur de la lire après le film, ça n'a quasiment rien à voir. Clémentine et Emma sont ici des esquisses, on a peine le temps de les voir s'aimer, car on passe un temps infini à lire un journal intime d'ado, pas toujours agréable à lire, souvent "cul-cul la praline" mais il reste de belles planches, par moment, muettes, où tout se joue magnifiquement dans des regards (la scène de la découverte des parents de Clémentine notamment). Des esquisses donc, où l'histoire d'amour a peu de temps pour se développer mais se révèle pourtant forte et charnelle quand il le faut. C'est surtout l'empêchement qu'à voulu montrer Julie Maroch Et surtout, elle porte un regard presque militant sur l'homosexualité et le chemin pour l'accepter, la vivre, sans se soucier des autres, dans l'abandon à l'autre...