Le dernier opus conçu par les propres soins d'Edgar P. Jacobs, enfin, disons en partie, puisque le dessin du deuxième et dernier tome avait été assuré par Bob de Moor, près de deux décennies après. La vache, le lecteur de l'époque avait dû attendre près de vingt ans pour connaître la suite de la première moitié ; je n'ose imaginer la frustration.


Je ne vais pas jouer à celui qui arrive à percevoir la moindre différence esthétique. Si je n'avais pas su tout ce que je viens d'écrire précédemment, je n'aurais jamais deviné que Jacobs n'a jamais achevé cet album.


Un album qui n'a pas la réputation d'être parmi les meilleurs. C'est sûr que si on compare à la plupart des précédents opus, celui-ci apparaît clairement mineur.


Mineur parce que ça reprend peut-être un peu trop certains éléments déjà vus dans l'univers du fameux duo. Ainsi, par exemple, la violation physique et psychologique de l'apparence et de la psychologie humaines, à la différence qu'ici ça se fait par l'intermédiaire de clones d'une force surhumaine, n'est pas sans rappeler La Marque jaune, l'assistant traître avait déjà été utilisé dans Le Mystère de la Grande Pyramide avec le personnage d'Abdul Ben Zaim (d'ailleurs, cela aurait été bien de développer les motifs de trahison de Kim, outre le fait qu'il soit coréen (donc ayant de très bonnes raisons d'en vouloir aux Japonais, quand on connaît les atrocités commisses par ces derniers à de nombreuses reprises par le passé envers ce peuple !), disons des motifs plus individuels, plus personnels pour être un peu moins manichéen, juste pour sortir du côté traître pour être un traître !).


Mineur parce que cela aurait été bien d'en savoir plus sur le robot Samuraï, qui aura un rôle essentiel à la fin.


Adieu Colonel, tu as été un antagoniste exceptionnel. On se croisera peut-être en Enfer, mais avant ça, dans les reprises évidemment, dont les récits seront antérieurs.


Mineur aussi parce qu'il y a une facilité scénaristique, étant en même temps une grosse incohérence, qui est vraiment trop visible, donc trop gênante, pour que l'on puisse passer à côté.


Ouah, c'est hyper-intelligent de faire prisonnier Satō dans une salle où il peut facilement contrôler ses machines au lieu de, je ne sais pas, le mettre dans une pièce vide.


Ouais, mais j'ai bien aimé quand même.


Le perfectionnisme (ne me faisant pas du tout m'étonner que Jacobs ait cherché pendant trois semaines à savoir à quoi ressemblait une poubelle japonaise !) et l'érudition habituels de l'auteur sur ce pays fascinant, entre tradition et modernité, peu connu au moment de concevoir l'album, ou du moins qui n'intéressait pas autant qu'aujourd'hui, font des merveilles. On est à mille lieues de tout pittoresque stéréotypé à deux balles.


Et les rebondissements s'enchaînent rapidement, bien aidés pour le coup par un texte nettement plus allégé que d'habitude, pour ne pas ressentir la moindre case de temps mort. Cela, on peut le mettre au crédit de ces aventures.


Ah oui, Francis Blake, dans la manière qu'il a de comprendre, lors de l'épisode de la chambre d'hôtel, en quelques secondes ce que les méchants sont en train de faire, en fait définitivement mon personnage préféré du duo principal.


Que dire de plus ? Si ce n'est : Adieu Edgar, j'ai été très heureux d'avoir croisé ton chemin.

Plume231
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le 25 févr. 2021

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