Néo Faust
7.8
Néo Faust

Manga de Osamu Tezuka (1987)

Eh bien, Tezuka ! ne me dis pas que tu as pactisé ?

Le manga Neo Faust est l'une des dernières créations de Tezuka et avec Ludwig B et Gringo elle restera à jamais inachevée. Tezuka n'avait pas terminé Vampires dans les années soixante, mais il avait aussi brutalement abrégé la série Dororo, visiblement considérée comme trop sombre pour des enfants en termes de stratégie éditoriale alors que la série animée de 1969 révèle bien que ce récit avait un énorme potentiel. Et le pire, c'est que Neo Faust est du point de vue du récit un très grand manga, au-delà bien sûr de l'influence du modèle de Goethe qui guide toute l'écriture. J'ai lu Neo Faust dans une bibliothèque, je ne pourrai pas revenir sur son esthétique. Pour moi, il est spontanément plus difficile d'en parler que des prouesses de MW, Ayako et Barbara. Mais ce que je peux facilement faire passer comme message, c'est que l'histoire est mature et intense. C'est aussi passionnant à lire que les trois mangas que je viens de citer. Tezuka a tellement produit, et parfois on est un peu déconcerté par ce qu'il propose. Là, je lis L'Enfant aux trois yeux et je m'avoue que pour la narration il a subi une mauvaise influence de ce qu'autorisaient certaines bandes dessinées de Walt Disney. Dans Debout l'humanité, on a droit à un chef-d'oeuvre, mais on a aussi un récit caricatural un peu leste qui fonctionne moins bien ou qui favorise moins l'immersion du lecteur. Neo Faust, c'était un futur manga imparable et on l'a perdu. Nous n'en aurons que la première partie, ce qui permet d'avoir une sorte de bouclage de ce que nous avons lu, bouclage étant le mot puisque nous avons, justifiée par le scénario, une reconduction de dessins et de scènes des premières pages, puisqu'en effet le héros a fait un pacte faustien où il retrouve sa jeunesse et retourne quelques années en arrière. Le héros est un scientifique dont la tête est clairement inspirée d'Einstein, image donc du grand génie à tête de clown. Les éléments du récit de Goethe sont transposés, mais on n'a pas du tout la sensation de lire une adaptation du récit de Goethe, à part pour ce qui est de la transposition de Marguerite dont la postface nous apprend que le mangaka lui-même n'en était pas fort satisfait. Tezuka en profite pour parler des révoltes étudiantes de la fin des années soixante, il revient sur la fermeture des maisons closes dans les années cinquante, il parle évidemment de création d'êtres vivants à partir des connaissances nouvelles en biologie, etc. Le Méphistophélès est revisité au féminin et la confrontation des deux principaux personnages masculins de l'histoire est prenante. Très peu de pages du début de la deuxième partie nous sont parvenues, on n'a vraiment que la première partie qui se termine vers la page 360 ou 380, avant une poignée de pages pour la seconde partie. Cela devient touchant car on nous livre à la fin les esquisses préparatoires, quelques pages simplement crayonnées avec les cases découpées et à l'intérieur le texte en japonais à l'emplacement prévu pour les phylactères (id est les bulles). On n'a pas les dessins ! Mais on sait qu'il avait une idée précise puisqu'on a les paroles des personnages placées à droite, en bas, à gauche, au centre des cases, etc. Puis, la case blanche finale... Le mangaka s'est tu... Que cela arrive avec le sujet d'un tel manga, c'est une coïncidence évidemment frappante, saisissante. On revient sur les pages de la première partie, aucun déclin de la santé mentale, tout était en parfait ordre de marche, et pourtant le génie s'est éteint à peu d'intervalle...
Fut-il emporté dans un pacte ?

davidson
8
Écrit par

Créée

le 2 mai 2019

Critique lue 176 fois

davidson

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