L'homme qui en savait peu

La première lecture de Spawn de nos jours peut difficilement relever du hasard, tant ce héros créé par Todd McFarlane en 1992 est considéré comme un classique. Plusieurs raisons à cela qui doivent être évoquées avant l'ouverture de ce premier volume intégral.

Pour commencer, la liaison étroite entre le comics et la naissance de l'éditeur Image Comics, créé dans le contexte d'un conflit opposant certains auteurs à l'éditeur Marvel et évoqué dans la postface par Frank Miller. Le droit d'auteur étant différent aux États-Unis, celui-ci lègue ses créations à son employeur, c'est-à-dire à l'éditeur. Non content de cette situation, ce sont 7 des dessinateurs les plus influents de Marvel, dont Todd McFarlane, qui décident de quitter le navire pour créer cette nouvelle maison. Ainsi, Spawn étant une des premières création, qui plus est avec un certain succès, celui-ci devient un étendard de cette insurrection (on ne parle malheureusement pas d'une révolution, et il faut se pencher sur les problématiques des épisodes 9 et 10 manquants dans ce volume pour s'en rendre compte).

Le scénario de base de l'anti-héros participe également à l'aura de l'oeuvre : Al Simmons, Lt Colonel était un agent des Forces Spéciales qui revient d'entre les morts pour retrouver son épouse, après un pacte signé avec le diable, il devra se venger et trouver un moyen d'échapper au sort réservé à sa nouvelle condition de HellSpawn.

Pour parachever l'état des lieux, on peut noter la présence des scénaristes Alan Moore pour l'épisode 8 et Frank Miller pour l'épisode 11, ce qui n'est pas rien pour nous mettre en appétit dès l'ouverture de ce premier tome.

Voici le tableau avec lequel il convient de débuter notre lecture, et c'est déjà long !
Mais rassurez-vous, il reste peu de choses à dire... Car ce tome n'est pas à la hauteur de ce qu'on peut en attendre après une telle entrée en matière. Si cette réédition présente l'avantage de mieux maîtriser son sujet à l'issue de l'épisode 13, on ne peut pas tout à fait tarir d'éloge sur le reste.
En commençant directement dans la peau de Spawn, on prend difficilement de la hauteur sur l'ensemble, les indices et réponses sont difficilement collectées, le plus souvent grâce à un discours descriptif au registre Drama bien trop premier degré (vous pouvez lire toutes les réflexions avec la voix de Bruno Salomone -cf Burger Quizz- pour améliorer votre lecture). De ce côté-là, on peut toutefois mettre en cause une traduction vers le français assez douteuse par moment, qui invite clairement à une contre-visite avec version originale.

Heureusement, les bases sont posées et on en sait déjà beaucoup plus sur Spawn, personnage à la fois charismatique -son costume à la Venom noir et blanc drapé de rouge et ses chaînes sont magnifiquement mis en valeurs sur certaines planches A3 vraiment parfaites, tant grâce aux couleurs qu'aux cadrages- mais également pathétique, avec une personnalité mélancolique. On retient également la petite référence à L'Homme qui en savait trop d'Alfred Hitchcock avec le quiproquo de la chapelle, très ironique pour notre héros qui en sait si peu.

J'ai eu l’occasion d'aborder l'univers de Spawn grâce au Spin-Off consacré à Sam & Twitch, le fameux duo d'inspecteurs que nous découvrons dans le tome 1, que j'avais trouvé tout à fait génial de A à Z, ce qui participe d'une part, de ma déception quant à la lecture de ce premier tome, mais aussi de mon espoir quant à la qualité des prochains épisodes, je vous redis cela très prochainement.