Don Lope de Villalobos y Sangrin et Armand Raynal sont deux de mes héros préférés. Les aventures de ces deux gentilshommes m’ont fait rêver durant des années au gré de la parution des dix tomes de « De Cape et de crocs ». A la conclusion du dixième épisode, je les avais quittés avec émotion. Le sentiment de manque était à la hauteur du plaisir que j’avais eu à suivre leurs épiques pérégrinations. C’est avec joie que j’ai donc accueilli la surprise offerte par Alain Ayroles et Jean-Luc Masbou : ils avaient décidé d’offrir une suite à leur saga qui prendrait la forme d’un préquel centré autour d’un personnage marquant, Eusèbe. Ma critique d’aujourd’hui porte sur le deuxième acte de son histoire intitulé « Si ce n’est toi… »
La quatrième de couverture présente avec les enjeux avec un lyrisme certain : « Se faufilant du salon des précieuses aux ruelles de la Cour des miracles, bondissant de complots en duels, le lapin Eusèbe, ancien garde du cardinal devenu rôtisseur, retrouve enfin le mystérieux Fulgence ! Frère aimant ou double maléfique ? A quoi peut bien ressembler ce jumeau ? »
Je ne vais pas vous mentir, il est indispensable d’avoir lu l’album précédent pour arriver à se retrouver dans cette intrigue aux nombreuses arcanes. Par contre, il n’est pas forcément nécessaire d’être familier avec l’intégralité des événements de la saga. Les afficionados de Don Lope et Armand souriront régulièrement aux allusions subtilement semées au cours de la lecture mais les novices ne pâtiront pas de ne pas saisir tous les clins d’œil.
Pour conclure, je dois te tresser les louanges à Jean-Luc Masbou. Ce dessinateur possède un trait fin et possède un goût pour le détail particulièrement aiguisé. Chacune de ses planches est un petit bijou que je prends toujours beaucoup de plaisir à découvrir. Aucun personnage ne laisse indifférent. Chacun génère un spectre de sentiments bien spécifiques. Certains nous irritent, d’autres nous touchent… La grande densité du scénario permet à Masbou de nous offrir un bestiaire haut en couleur ! En effet, je me rends compte que j’ai oublié de vous préciser que certains personnages, à l’image du héros, prennent des traits animaliers. On croise des canards, un loup, un ours, des lapins, un singe… Ce choix narratif n’est pas anecdotique. Leur anthropomorphisme sublime leur humanité.
Au final, vous l’aurez compris, j’ai pris beaucoup de plaisir à suivre les aventures d’Eusèbe. La personnalité assez unique du héros fait de cette histoire une lecture particulièrement agréable. Contrairement à bon nombre de suite, celle-ci n’est pas juste une exploitation d’un filon à succès. « Si c’était toi… » enrichit réellement l’univers de la série et s’inscrit pleinement dans l’ensemble de cette grande saga du neuvième. Ce préquel n’est pas un appendice maladroitement ajouté mais un prologue de grande qualité qui donne envie de se replonger au plus vite dans la décalogie initiale. J’y vais de ce pas…