"Tout ce qui est doit finir, un jour sombre se lève pour les Dieux"
Inspirée de la fameuse histoire de Nibelungen, Siegfried nous raconte le destin tragique de Siegfried, chargé par Odin de tuer le dragon Fnafir.
Il y a deux types de lecteurs de BD : ceux qui lisent rapidement, avide de découvrir l'histoire, et ceux qui prennent le temps, admirant au passage les paysages. Je fait plutôt parti du deuxième type, et c'est tant mieux pour cette histoire ! Les pages sont belles, surtout les doubles pages, remplies d'intensité et d'histoires... mais aussi ne l'oublions pas il s'agit d'un drame, et un drame ça se savoure.
En lisant Siegfried, j'ai souvent imaginé entendre un conteur prendre la place de la sorcière Völva, narrant l'histoire de Siegfried. Les évènements dépeint le méritent, le lecteur ne peut pas se permettre de passer rapidement sur la mort des parents de Siegfried, tués de la main de Odin, les ordres stricts du dieu concernant le dragon Fnafir, le retrait des immortels de la terre, livrée à elle même, le refus d'obéir de LA walkyrie, fille d'Odin, qui sacrifie son immortalité pour l'aider, puis paie le prix fort pour aider Siegfried... Tous ces instants et bien d'autres sont posés, avec peu, voir pas de dialogues. Il faut s'immerger dans l'ambiance et l'histoire dont dépend au final le destin du monde, des dieux et des amoureux maudits.
L'auteur s'est évidemment permit quelques libertés avec l'histoire originale (tellement racontée et déformée depuis le temps), aussi je recommande de consulter les annexes en fin de BD qui expliquent ces divergences, le point de vu de l'auteur, ce qu'il a voulu faire ressentir, en plus de fournir divers croquis/peintures supplémentaires parfois magnifiques.
J'ai aimé "La Walkyrie" pour son coté grandiose, le personnage ambigu de Volva, le duel d'énigmes mortel entre Mime et Odin, la détermination de la Walkyrie prête à tout pour aider son père et le monde quel qu'en soit le prix. Siegfried est au centre de cette histoire, tout tourne autour de lui, pourtant bien souvent son coté naïf/ignorant (d'abord enfant puis adulte isolé du monde) l'empêche de prendre les décisions, et ce sont au final tous les personnages "secondaires" qui l'aident, s'opposent à lui, le manipulent et qui en ressortent grandis, sinon de bonté, au moins d'importance dans le récit !
C'est aussi ce que j'aime avec la mythologie nordique comparée à la mythologie chrétienne : des personnages plus subtils, moins de manichéisme, moins de prévisibilité même si le récit souffre parfois lui aussi d'incohérence flagrantes. Et tant pis si je me fait jeter des pierres pour ce dernier commentaire :)