Un superbe récit qui, bien que classique et sans grande surprise, joue plusieurs rôles !

Trinity Rebirth est un titre que j'attendais beaucoup. Il faut dire qu'il réunit trois réussites de ce Rebirth. Superman est clairement la plus grande réussite des trois super-héros, le relaunch lui a fait énormément de bien ! Wonder Woman est probablement mon super-héros préféré et si, je regrette la mythologie développée pendant les New 52, simplement formidable, le fait est que la mystérieuse cohabitation des origines pré-Flashpoint et post-Flashpoint était intéressant. Deux arcs traités en parallèle, un premier très bon revenant sur ses origines et un plus classique s'inscrivant dans la chronologie DC contemporaine. La qualité reste de mise. Finalement, malgré ses nombreuses qualités, c'est finalement le titre Batman qui me surprend le moins, ou du moins provoque le moins d'émotions. Mais les titres du chevalier noir, il faut l'avouer font preuve d'une assez surprenante constance dans leur qualité depuis très longtemps.


Réunir les trois super-héros, c'était donc signe d'un récit exceptionnel. Et je vais commencer tout de suite par le point qui pourrait lui être reprocher, celui-ci n'est pas très surprenant. On apprend même finalement rien sur les personnages. Le récit revient sur trois pans de la vie des super-héros très connus, les trois retourneront ensemble dans leur passé. Le récit concernant Superman se concentrant sur la relation qu'il avait avec son père enfant, celui de Batman sur la mort de ses parents et son traumatisme, enfin celui de Wonder Woman sur son choix de quitter l'île de Themyscira. Techniquement donc, pendant une première moitié du volume, on n'apprend rien de nouveau.


Qu'est-ce qui rend donc cette première moitié si réussie ?


L'évidence mettra en avant la qualité visuelle du titre, les planches sont magnifiques et le jeu des couleurs, se renouvelant selon l'univers de chaque super-héros, sublime le tout ! La mise en scène, très efficace, permet d'apprécier l'intensité émotionnelle de ses scènes, bien connues, mais toujours aussi marquantes. Les super-héros adultes, spectateurs et en partie acteurs de leur passé, ajoute ce regard chargé d'émotions sur ces événements déjà chargés d'émotions. On peut donc voir dans ce récit un magnifique hommage à nos héros.


Cependant, chacun de ses événements, chacune de ses périodes, fut déjà narrés à de nombreuses reprises auparavant, et régulièrement brillamment. Il faut donc pour expliquer l'intérêt de ce titre expliquer son importance dans le Rebirth car c'est là toute la force du titre selon moi qui ne se contente pas d'un prodigieux hommage. Ces trois super-héros sont centraux dans la Justice League et plus généralement, dans l'univers DC. L'arrivée du Superman de l'âge classique, techniquement inconnu des deux autres super-héros, pose donc problème. Comment l'intégrer rapidement pour permettre une dynamique qui ne soit pas trop laborieuse ? C'est tout l'objet de ce volume qui s'introduit justement par la volonté de Lois Lane d'inviter à dîner Wonder Woman et Batman, pour que les deux super-héros apprennent à connaître ce nouveau Superman, surgi de nulle part. L'aspect factuel n'est pas le seul traité dès le début du comics, l'aspect psychologique est aussi développé. Habitué à devoir cacher son identité depuis toujours mais surtout depuis son arrivé dans ce monde, Clark Kent a élevé autour de lui maintes barrières protégeant sa famille et son identité. A travers ce périple à trois au coeur des événements les plus marquants et traumatisant de leur vie, ces barrières que chacun des héros construit pour se protéger s'affaiblissent. Chacun assiste à l'intimité des autres. Ce récit est donc essentiel au développement de la suite de la série mais aussi pour la série Justice League et aura de rapides répercussions, expliquant par exemple, l'amitié entre Batman et Superman, à laquelle on assiste dans le deuxième tome de Superman, "Au Nom du Père". Cette problématique continuera d'être développée plus précisément dans la deuxième moitié du tome avec un arc plus original dans lequel interviendra Mongul et Poison Ivy.


La réussite de ce tome est d'autant plus admirable qu'on considère qu'elle permet aussi de rappeler la problématique essentielle des super-héros en ce début de Rebirth.
Le récit concernant Superman est finalement une ingénieuse mise en abîme. En se centrant sur les peurs paternelles de Jonhatan Kent éduquant Clark Kent, la peur concernant le fait de savoir gérer les pouvoirs naissant de son fils, la peur de se voir enlever ce fils surgit de nulle part, Superman assume mieux ses propres peurs en tant que père, avec le tout jeune Jon aux pouvoirs naissants surtout en cette période, où il a décidé de revêtir à nouveau le rôle de Superman sur cette planète. Il assume à la fois mieux ses peurs, car il les retrouve chez celui qui fut un merveilleux père mais aussi en comprenant que sa situation est plus facile encore, puisqu'au moins lui comprend en partie ce que peut ressentir son fils avec ses pouvoirs, ayant lui-même vécu une enfance similaire.
Le récit concernant Batman peut sembler être celui apportant une perspective moins spécifique à la situation du chevalier noir. Cependant, subtilement, il est lié malgré tout. En effet, si Batman dut durant son enfance accepter d'affronter seul ses peurs pour devenir celui qu'il devint, les arcs actuels montrent qu'il lui faut réussir à abaisser sa tendance à la solitude pour créer de solides équipes d'alliés, ne pouvant plus compter seulement sur un fidèle Robin. En constatant l'hypothèse qu'il aurait pu surmonter ce traumatisme, il devient donc davantage prêt à gérer et créer cette grande famille autour de lui composée de maints alliés, avec qui il prenait auparavant ses distances comme Batwoman, ou qui était ses ennemis comme Gueule d'Argile Clayface, sans mentionner l'ancien Red Robin et les récents personnages tels, l'Orpheline et Spoiler. Son traumatisme le poussait à vouloir jusque-là tout contrôler directement, sans laisser trop de marge de manoeuvres à ses alliés proches. Dans ces arcs, il doit accepter de laisser Batwoman prendre ses marques autant que général des troupes, mais aussi accepter la dynamique d'un groupe plus hétéroclite, et par nature plus complexe car comprenant moins de personnes.
Enfin le récit concernant Wonder Woman rappelle la problématique actuelle de la super-héroïne, son incapacité à retrouver Themyscira. Cet événement est traité de manière un peu factuel dans les récits Rebirth de Wonder Woman. Non pas qu'il n'y ait pas dans ceux-ci un aspect psychologique et émotionnel, mais celui-ci concentre davantage sur une autre problématique, la confusion des origines et des souvenirs de l'héroïne. Événement primordial et prioritaire de ce Rebirth, cherchant a priori à rétablir le contexte de l'âge classique sans occulter celui introduit dans les New 52, rendre caduque ce dernier sans le nier pour autant. Il s'agit donc ici d'apporter un poids émotionnel et dramatique à cette incapacité de l'héroïne à retrouver son île, en reliant ce fait au choix de Wonder Woman de quitter son île, son peuple, sa famille, pour servir d'ambassadrice dans le monde des hommes. Et le récit réussira à merveille à traiter la culpabilité ressentie par l'héroïne, et à résoudre cette culpabilité. Ce récit classique, qui ne semble guère nous en apprendre, réussit donc pourtant en peu de pages à résoudre subtilement bien des problématiques.


Enfin pour terminer l'éloge de ce premier volume, il faut mentionner sans trop en dire pour laisser tout le suspens aux futurs lecteurs, la seconde partie. Se concentrant sur la cause de ces plongées dans le passé. un récit se développe amorcé autour de Poison Ivy. Visuellement, c'est encore l'occasion d'apporter de magnifiques planches, et un nouveau jeu de couleur adaptée au personnage, qui ravira les yeux les plus sensibles ! Mais malgré son manque de conséquence direct final sur le personnage, bien que la porte reste ouverte, ce récit permet de rendre d'autant plus attachant Poison Ivy. J'ai beaucoup apprécié cela, car il faut savoir que les New 52 ont rendus beaucoup plus ambigus les personnages que son Harley Quinn et Poison Ivy, de plus en plus souvent du côté des gentils. Malgré leur absence de moralité, on perçoit finalement la tendresse des coeurs des deux personnages. Une série limitée, Poison Ivy Cycle of Life and Death, chevauchant la période New 52 et la période Rebirth, se concentrait d'ailleurs sur la femme fatale. Sympathique récit, il restait selon moi difficile de vraiment s'attacher au personnage. A la suite de ce récit, j'éprouve à son encontre bien davantage d'empathie !


Que conclure finalement ? Ce récit, chargé d'émotions, essentiel à mon avis pour apporter nuances et profondeur à l'univers, permettant même de mieux apprécier les séries propres à chaque super-héros, doit être abordé avec simplicité. S'il semble classique, il n'en est pas moins travaillé dans les moindres détails. S'il ne surprend pas, il solidifie tout ce qui est connu. Pour pleinement l'apprécier, je crois qu'il ne faut pas s'attendre à un scénario ouvertement complexe, à des rebondissements trépidants et à des changements de statu-quo primordiaux et finalement l'apprécier pour ce qu'il est, probablement l'une des meilleures oeuvres de Francis Manapul qui avait déjà fait montrer de son côté virtuose mais qui ici, au-delà, prouve à mon sens son génie.

Vyty
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le 3 mars 2018

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Vy Ty

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