"Mince ! Je déteste quand mes coups montés deviennent réalité !" Pauvre Gryph, on le comprend ! Mais s'il y a bien une chose que nous avions appris dans le tome 1 de Star Wars : Chevaliers de l'Ancienne République et qui se vérifie dans ce tome 2, Ultime Recours, c'est que tout stratagème impliquant Zayne Carrick est voué à capoter après un bon départ.


C'est ainsi que la petite bande de fugitifs, qui avaient réussi à échapper aux maîtres jedi de Taris, croit avoir réussi un bon coup en faisant fuir les mineurs d'un avant-poste de la planète Vanquo en simulant une attaque mandalorienne... lorsque les "têtes de seaux" en question lancent un véritable assaut en règles ! Zayne, Gryph, Campeur et LB parviennent à s'échapper sur le vaisseau donnant son nom à l'album, mais pas Jarael, que les Mandaloriens prenaient pour un Jedi puisqu'elle s'amusait avec le sabre-laser de Zayne (pas de commentaire salace, s'il vous plaît) tout en étant déguisée en maître Q'anilia. Eh oui, c'est ballot...


Cette entame à 100 à l'heure, encore une fois parsemée de dialogues géniaux ("Les taudis ont produit de fins gourmets, Zayne. Ne dis pas de mal des taudis"), nous la devons bien sûr au scénariste John Jackson Miller, mais aussi à un nouveau dessinateur, déjà le troisième sur la série : Dustin Weaver. Son style beaucoup plus "comic booky" (Weaver a depuis travaillé sur X-Men et Les Tortues Ninjas) que le dessin japanisant de Brian Ching convient cependant parfaitement aux personnages et au dynamisme du récit, de sorte que je m'y suis vite habitué. Nous retrouverons très vite l'ami Ching, mais dans l'immédiat il ne me manque pas.


Zayne et compagnie embarquent également un passager inattendu : Rohlan Dyre, Mandalorien à l'armure rouge à pointes et à la visière verte, qui ressemble furieusement à Idris Elba lorsqu'il retire son casque ! Rohlan est un "Mandie" un peu spécial, surnommé "le Poseur de Questions" par ses pairs. En effet, bien que guerrier émérite et légendaire parmi les siens, il a plusieurs fois déserté pour tenter de comprendre dans quel but leur dirigeant actuel, Mandalore L'Ultime, lance ses attaques sournoises contre la République, loin des idéaux chevaleresque de leur race. Si seulement je pouvais lui recommander les futures vidéos de maître Gnost-Dural pour le jeu vidéo The Old Republic, il en ferait la jaunisse !


Mais pour l'heure, Jarael est emmenée sur l'étoile de Flashpoint, sorte de Guantanamo mandalorien, où elle rencontre le jeune jedi Squint, aperçu au début de Il y a bien longtemps..., torturé et rasé de près par le docteur Mengele local, un savant fou au nom génial de Demagol. Ce dernier torture les Jedi pour connaître l'origine de la Force, ce qui est un concept amusant (pour le lecteur, pas les Jedi prisonniers...) ainsi qu'une petite pique au bazar créé par George Lucas et ses "midi-chloriens" quelques années plus tôt. Demagol semble particulièrement intéressé par Jarael et ses oreilles pointues, lorsque Zayne, Gryph et Rohlan recréent le stratagème de tantôt, avec plus de succès, en faisant croire à un attaque d'un croiseur de la République, la Bouilloire Stellaire. Si ce n'est pas le meilleur nom d'un vaisseau dans l'univers SW, je ne sais pas ce que c'est...


La garnison abandonne ses prisonniers, Demagol est assommé et capturé, et Squint essaie de convaincre le futé Zayne de les rejoindre, lui et "son maître", dans leur propre croisade pour repousser les Mandaloriens et comprendre l'origine du conflit. Zayne hésite mais refuse, car il doit avant tout prouver son innocence dans le meurtre des padawans de Taris, et réparer les dégâts causés par les maîtres du Pacte. Squint fait alors ses adieux, en emportant la fameuse combinaison spatiale rouge de la vision des maîtres sur la lune Rogue, tandis que Rohlan s'insinue en douce sur le Dernier Recours...


La deuxième partie voit le retour de Brian Ching et son coloriste Michael Atiyeh, toujours aussi en forme. Elle est consacrée aux maîtres en question, et au fameux "Pacte" qu'ils servent. Nous apprenons que Lucien Draay, l'ancien mentor de Zayne Carrick, est le fils d'une richissime héritière jedi, Krynda Draay. Cette dernière est à la tête d'un véritable "Ordre Jedi au sein de l'Ordre", composé essentiellement de voyants, dont Q'anilia, Feln, Xamar et Raana Tey sont les plus puissants, et Lucien leur garde du corps. Situé sur Coruscant, à quelques encablures du Temple Jedi, le domaine Draay est géré par Haazen, personnage mystérieux et encapuchonné, le 3219ème de son genre dans l'univers SW, un "padawan déchu" réduit à l'état de Cyborg.


Ce chapitre consiste essentiellement en allers-retours entre le passé et le présent du Pacte. Les flahsbacks nous permettent de comprendre que Lucien n'a jamais eu une bonne relation avec sa mère, qui lui reproche de ne pas avoir le don de vision du futur comme elle. Surtout, Krynda vit dans la honte de ne pas avoir anticipé la trahison d'Exar Kun, jeune jedi devenu le plus puissant Seigneur Noir des Sith pré-Palpatine. C'est ce mélange de frustration filiale et de désir d'éviter à tout prix une nouvelle incursion des Sith qui explique pourquoi Lucien et ses quatre acolytes ont froidement exterminé leurs apprentis sans en référer à Krynda et Haazen.


La situation présente des cinq Jedi n'est d'ailleurs pas plus réjouissante : le peu commode maître Lamar Vrook (doublé par Ed Asner dans les jeux KOTOR et KOTOR2) et ses collègues du Conseil décident de les séparer pour asseoir leur autorité sur le Pacte, qui est toujours resté en marge du Temple. Ces scènes de la tour du Conseil sont également l'occasion de voir une autre figure encapuchonné, qui donnera un "geekgasme" à tous les vétérans des deux jeux susmentionnés...


Le dernier chapitre marque la continuation du turnover, puisque sa première moitié est dessinée par Brian Ching et la seconde par un nouvel artiste, déjà le quatrième en deux tomes : le Philippin Harvey Tolibao. Son dessin est encore plus, euh, moderne que celui de Dustin Weaver, et la transition aurait pu être plus heureuse que cet effrayant gros plan d'une Raana Tey en furie, dont les mains sont curieusement grotesque et veinées. Souple, vif et détaillé, le dessin de Tolibao joue surtout sur les visages, un peu plus caricaturaux que ceux de ses collègues, ce qui donne néanmoins quelques cases d'anthologie, comme celle où un Gryph exaspéré tente de convaincre Dob Moomo de trahir son frère.


Dob et Del Moomo sont deux chasseurs de prime ithoriens (la fameuse race des Hammerheads, dont Eliot possède une figurine dans E.T) assez, hum, atypiques, dirons-nous. "Tu sais comment les Ithoriens font pour rester si polis et pacifiques ? Ils font bosser des gars comme ces deux-là. Ils se sont réveillés du mauvais côté de leur espèce. |Ils sont dangereux, mais] seulement pour leurs employeurs. [...] C'est pour eux qu'on a inventé le mot "crétin" " explique Gryph.


Pas étonnant, donc, que ce chapitre soit essentiellement comique, dès l'entrée en matière : Jarael et Campeur se déguisent en aristocrates arkaniens pour récupérer un pactole laissé par leur associé snivvien sur la planète bancaire Télérath, sorte de Nassau galactique, superbement représentée par Ching et Atiyeh. Comme d'habitude, rien ne se passe comme prévu, puisque le banquier chargé de la transaction est enlevé par les Ithoriens susmentionnés. Ce petit employé sans histoire n'est autre qu'Arvan Carrick, père de Zayne ! Raana Tey a chargé les Moomo de l'enlever pour attirer Zayne. Malheureusement pour elle, elle n'a pas bien regardé leur CV sur LinkedIn, puisque Zayne et Gryph parviennent aisément à les rouler pour délivrer Arvan, lequel fait état de sa foi en son fils ("On te connaît, tu ne l'as pas fait. Et si c'était le cas... ce serait sans doute parce que tu n'avais pas le choix.") avant de se mettre sous la protection de l'académie jedi de Dantooine, où Zayne a été formé avant de rejoindre Lucien.


L'incessant changement de dessinateurs est irritant, mais pour ma part je trouve qu'il sert bien Ultime Recours, dont la structure se divise essentiellement en deux éléments : les aventures "provinciales" de la bande à Zayne, lesquelles se résument surtout à des subterfuges tombant à plat avant de finalement réussir, un peu comme si Iznogoud parvenait à devenir calife à la place du calife ; et le développement de l'intrigue principale par l'entremise du chapitre central consacré au Pacte, qui montre les enjeux très importants de l'histoire tout en connectant cette dernière aux jeux vidéos. Tout cela est à la fois divertissant et intriguant, mais confère à Ultime Recours une impression de simple album de transition, entre la folie de l'entrée en matière dans Il y a bien longtemps... et les événements dramatiques du troisième tome à venir. Un album de très bonne facture donc, mais pas le plus mémorable de cette série unique en son genre.

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le 13 janv. 2020

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Szalinowski

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