Astérix chez les Pictes - Astérix, tome 35 par CosmixBandito

Asterix, oeuvre de bande dessinée, medium embourgeoisé où se déploierait les ambitions larvaires d'introvertis dégueulant la médiocrité de leur existence, a vécu. Asterix, élevé au rang d'art populaire, on ne fait pas plus noble de nos jours, se fait désormais le champion d’un grand dessein démocratique, l’art pour les nuls. Asterix oeuvre beauf, premier volet. Chez les pictes donc. L’Ecosse quoi. On convoque, piteusement, le monstre du Loch Ness, monstre bête, bête seulement, domestiqué de case en case, aimable, minable oui, avatar sans mystère d’une contrée qui en regorge pourtant. J’attendais de la sauvagerie, je l’avoue. Quelque chose de primitif, quelque chose tapie derrière un mur qui n’existe pas encore. Et puis rien. L’Ecosse on ne la voit pas. Il y a des mecs en kilt qui se balance des troncs, si c’était un passe-temps encore, de l’absurde j’en demande, mais non, seulement un sport, auquel le lecteur n’est pas convié, pas le temps, l’art beauf est un art sérieux, il y a un scénario à suivre, un plan à respecter, on ne digresse pas, le récit d’abord, pour le cadre on peut toujours se brosser. Nos héros ont pris la mer, preuve batarde d’un déplacement de l’intrigue, ils auraient aussi bien revenir sur leurs bords. Il n’y a pas d’Ecosse. Le seul élément couleur local, si on oublie la bêbête, est traité de la manière la plus révoltante imaginable (révélateur du nouveau glorieux statut d’Asterix), on boit, oui, mais avec modération. L’eau de Malt, avec beaucoup d’eau pour les héros, pure pour les bad guys (inexistants par ailleurs, pauvre figure verdatre, toute délavée de sa haine, tremblante d’excitation éructée en maigre filets), vient couler définitivement la gentille transgression à l’oeuvre depuis des décennies : l’ivrogne, sale engeance. Farpaitement !
Pour meubler le discours, il y a bien ce départ, le beau picte chassé par les mâles en danger devant les bouffées de chaleur des matrones, et puis, las, la révolte des femmes esquissée pour le bien du récit, se dissolve dans un féminisme aseptisé, nouvelle resusée de mommy-porn-soft, l’égalité homme femme ramenée elle au rang de bonne blague, après tout, le lecteur sait bien que en deux millénaire nous avons parfaitement résolu tout ça, inutile de s’attarder. Alors on enquille les jeux de mots plus ou moins heureux, toute la splendeur du beauf-art apparait au détour de quelques planches. Pourtant, au milieu des rassis que l’on prévoit encore davantage rance avec le temps, il doit y avoir des bons gags. J’ai ri, je m’en souviens, mais je ne sais plus pourquoi.
CosmixBandito
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le 23 oct. 2013

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