Quand on pense à Tchernobyl, on s’imagine une terre dévastée comme le Mordor, irradiée, peuplée de monstres difformes et radioactifs, tout droit sortis de Godzilla ou Stranger Things. Autant dire que lorsqu’une équipe d’artistes part explorer la zone interdite pour retranscrire cette vision d’horreur, ils sont pour le moins surpris de découvrir une nature luxuriante, débarrassée de la présence de l’homme, un havre de paix où la vie a repris son cours. "Je croyais me frotter au danger, à la mort, et la vie s'impose à moi" écrira le dessinateur Emmanuel Lepage devant cet Eden d’où les hommes ont été bannis. Sous ses traits, la vie et les couleurs jaillissent, éclaboussant les dessins. De même que les visages des quelques habitants qui peuplent cette contrée maudite illuminent chaque page, dissimulant un drame invisible qui impreigne toutes choses et ronge les corps. C’est la terrifiante révélation que nous fait Un printemps à Tchernobyl, celle d’un monde à la beauté infinie et d’où nous sommes irrémédiablement en train de nous chasser.