007 Spectre par Tonton_Paso

J'avoue, pour moi, les James Bond c’est un peu comme les films de zombies : même si c'est très très mauvais — et c’est souvent très très mauvais — j’y vais quand même. Je suis passionné par ce grand monument de l’hétéro-beauferie depuis que j'ai découvert contre toute attente à l’âge de 11 ans qu’on pouvait totalement concilier homosexualité et fascination pour le poitrail velu de Sean Connery. Comme quoi les clichés parfois.

Ça démarre plutôt gentiment, bam le gun-barrel, et puis bim le pré-gen assez classieux à Mexico. Le joli plan séquence d’ouverture est malheureusement un peu gâché par une grosse scène d'action pas super bien filmée mais bon, ça, tant que les producteurs auront pas compris que pour réaliser un James Bond il vaut mieux choisir des petits artisans de la série B (Young, Campbell) plutôt que des « auteurs » en fin de parcours (Tamahori, Forster), on aura pas d’autre choix que de subir ces grosses bouillies numériques incompréhensibles montées à la scie sauteuse... Après t'as l’inévitable générique à base de meufs à poil : les graphistes ils ont tellement foutu des tentacules de pieuvre partout (because le logo du film au cas où t’aurais pas compris que ça va parler d’organisation du mal tentaculaire) que j'ai eu l'impression de mater du hentai en 3D moche. Par contre, la soussoupe de Sam Smith est toujours aussi plate mais elle passe beaucoup mieux avec l’esthétique hétéro-pompière du générique du coup je l'ai BIEN dans le crâne depuis des mois au secours délivrez-moi je veux mourir.

Sinon l’intrigue du film est assez anxyogène : terrorisme et surveillance généralisée, c'est pas forcément ce que j'avais envie de voir en ce moment pour me changer les idées. Et comme les mecs ne sont pas capables de maintenir une véritable direction sur quatre films consécutifs ils sont obligés de retcon toute la période Craig comme des gros sagouins. On résume : le Chiffre c'est SPECTRE, Mr. White c’est SPECTRE, Quantum c'est SPECTRE, Javier Bardem avec sa golden moumoute et le dentier de ta grand-mère qui veut se venger de méchante maman M c'est SPECTRE aussi. Y a pas à dire, c'est quand même bien pratique les conspiracy theories pour justifier les scénars pétés.

Ce qui est dommage c'est que toute l'esthétique flamboyante, super-colorée, et les scènes d'action relativement créatives de Skyfall ont été remplacées par une espèce de camaïeu grisouille-beige un peu tristoune et de rares courses-poursuites assez plan-plan. En dehors de ça, c'est presque un meilleur Bond que le précédent, peut-être le best Craig après Casino Royale. Parce que bon je ne sais pas trop à quoi les gens s’attendaient après tout : la série n’a jamais été foutue d’accoucher d’un seul véritable chef-d'œuvre... Regardez Bons baisers de Russie c'est du sous-Hitchcock, Goldfinger ça casse pas trois pattes à un canard, et Opération Tonnerre, objectivement, c'est super mollasson hé bien c'est quand même le Bond ultime. Là, c'est pareil : l'histoire avance à deux de tension mais en fait c'est cool, il faut qu’on se fasse un peu chier sinon c’est pas vraiment bondien.

De toutes façons on savait à peu près ce que les mecs nous préparaient avec le final patriarcat4ever de Skyfall : on nous fait un gros back to the roots après nous avoir sorti un Bond bien bourrin, alcoolo et quasi Gaston Lagaffe avant de relâcher Craig qui commence à se faire un peu vieux pour le rôle. La limite du dispositif c’est que ça finit par ressembler à une grosse compile de citations : la baston ferroviaire entre Craig et Monsieur-Ours-2016™ comme dans Bons baisers, la réunion secrète de Thunderballs, la base cachée à la déco soyez-Palace-chez-vous d’On ne vit que deux fois, la clinique en haut d’une montagne OHMSS-style, le Blofeld chevelu, vanneur (et un peu sous-exploité) de Waltz qui rappelle le Blofled des Diamants, etc., etc. C’est quasiment toute la période Connery qui est condensée en un seul film : on va pas s’mentir, ça commence à faire beaucoup et on a un peu l’impression d’avoir déjà tout maté (logique). Mais bon c’est pas trop désagréable si t’es un minimum Bond-fan. Et puis il faut bien reconnaître qu’on a rarement vu quelque chose de plus sublime que Monica Belluci en Louboutin.