Et pour ce soir (ou ce matin, mes habitudes sont chamboulées) :
120 battements par minutes, 2017, de Robin Campillo, avec Nahuel Pérez Bisayart dans le rôle de Sean.
Synopsis claque-doigt : Paris, France (au cas où vous confondriez avec Paris, Texas), début des années 90. L’épidémie du SIDA n’est plus un secret, elle a percuté un pan énorme de la jeunesse qu’elle a balayée d’un revers, face à une opinion et des pouvoirs publics déchirés. Face à l’inefficacité ressenti des séropositifs devant les labos pharmaceutiques qui voient une bonne façon de se remplir les poches, l’association Act Up nait, inspiré du mouvement du même nom, né au Etats-Unis. Pour eux, ce militantisme ne se fait pas uniquement par les mots, il se fait par l’action spectaculaire, pour marquer l’opinion, mettre à la vue de toutes et tous les réalités ressentis. Sean est un adhérent de la première heure, séropositif. Nathan un séronégatif qui veut découvrir cette association. Entre peur, rire, amour, pulsion de vie et de survie, désaccord sur la marche à suivre et volonté coute que coute de ne pas avoir vécu pour rien, le quotidien se heurte avec cette crainte numérique incarné par la baisse des lymphocyte T4 et le risque que tout s’arrête…
Je crois que ça fais un bail que je n’ai pas vu un film primé au festival de Cannes. Le dernier qui m’avait marqué, c’était Drive. Et en règle général, je suis plutôt bon spectateur des films qui sortent du festival de la Croisette. Du coup, que vaut ce « tachycardie un peu important » ?
Eh bien… c’est une superbe reconstitution de la perception de la reconnaissance du SIDA des années 90. D’ailleurs, cette reconstitution passe aussi par sa musique, avec de la House qui transpirait bien ces années complexes de la mode. Il a aussi le mérite de montrer l’intérieur des associations et de leur militantisme très ancré dans les théories de guérilla du Che, ainsi que les importantes dissensions en interne, un trait à priori indissociable à tout mouvement militant qui se respecte.
Durant le début du film, j’avais Dallas Buyer Club en tête, qui reste un des films les plus passionnants sur le sujet du SIDA que je connaisse. Je craignais ne pas réussir à me l’enlever de la tête, me dire qu’il était plus profond, mieux interprété et tout. Et passé les 20 premières minutes (et merci à son ouverture, brillante pour contrebalancer cette sensation), tout ça m’a quitté l’esprit. Merci à cette mise en scène à la fois très direct, avec beaucoup de plan serré sur les visages, mais aussi un bon dynamisme pour ressortir la violence des débats. Au passage, il y a un super gimmick de mise en scène : Les plans « envolée de poussières sous les raies lumineux », un effet pas cher et très joli esthétiquement, mais qui ici, parvient à s’insérer dans le récit, me rappelant pour ma part l’espace et l’immense fragilité de nos être.
Niveau interprétation, bravo, on m’aurai dit que c’était un documentaire, j’aurai pu y croire. Tout le monde est d’un naturel désarmant. Mention spécial à Sean, incarné par cet inconnu (pour ma part en tout cas) de Nahuel Pérez Bisayart, confondant d’authenticité ! Tout le monde incarne parfaitement son rôle et le tout crée une homogénéité parfaite, qui fait qu’on ne sort jamais du récit une seule seconde !
Jamais misérabiliste, mais toujours honnête face aux réalités, il faut cependant accepter l’idée que les propos risquent d’être durs et que ce qui vous attends sera quasi sans concession. Mais si vous acceptez cette réalité, l’idée d’être désarmé et cassé, alors foncé, parce que ça le mérite ! Au passage, merci de faire des rappels de base sur le fait que c’est pas nécessairement une maladie d’homo, parce que je suis sûr qu’aujourd’hui encore, vous seriez surpris…