Dieu sait comme j'avais haï Slumdog Millionaire et que la déception avait été terrible car je me disais (et je me dis toujours) "Comment un réalisateur aussi brillant (Petits Meurtres entre amis, La Plage...) peut il faire une merde aussi aseptisée que l'est cette daube de Slumdog..." et je finissais toujours le titre de ce film par un ou plusieurs mots souvent en lien avec mes attributs malsculins...
Autant dire que j'attendais ce film avec impatience, voir si Boyle avait définitivement sombré où s'il restait une once d'espoir... combat qui semble en rapport avec ce film.
Heureusement le film est court et ne dure pas ... 127 heures (padum tssss). Tant mieux. Pas comme "Slumdog de mes c*******".

On retrouve là la patte Boyle, même si l'on sent que ce dernier se cherche un peu ; son style semble être celui d'un réalisateur qui imite du Boyle, une pale copie de lui-même. L'Anglais avait déjà tourné un huit-clos ( Petits meurtres...) et avait réussi avec brio (c'était pourtant son premier film). Le montage est nerveux, comme d'habitude, l'image est remplie d'effets (surexposition, accélération du temps, effet caméscope...) et de trouvailles qui étonne et font sourire. La caméra de Boyle s'immisce de partout. Vraiment de partout ; sur le toit d'une voiture, au guidon d'un vélo aussi bien que dans une gourde ou même DANS le bras du personnage... Le tout est ultra - intimiste (difficile de faire autrement quand on a qu'un seul personnage et un espace de jeu de 1,5 mètre carré) et est enrichi par des gros plans, des TRÈS gros plans qui contrastent avec de magnifiques plans d'extérieur très larges qui montre les paysages de désert américains comme jamais.

Boyle joue avec nos nerfs autant qu'avec ceux de son personnage. Il n'hésite pas à nous plonger dans son âme, à nous montrer ses pensées (flash-back, étapes de la vie qu'il semble connaître comme les répliques d'un film..., musiques qu'il écoute ou auxquelles il pense...). Il fait subir à son personnage (je ne sais pas si tous les faits du films sont réels car je n'ai pas lu le livre dont 127 heures est une adaptation...) les pires atrocités, dignes des cauchemars les plus troublants : couteau qui tombe et qui est quasiment inatteignable, gourde qui tombe et se renverse, fausses séquences ou le personnage s'enfuit de sa prison naturelle, caméra qui quitte à plusieurs fois le canyon...) et nous met à l'épreuve. Les scènes de découpage de bras sont éprouvantes ; Boyle montre tout juste ce qu'il faut : ni trop ni pas assez. On ne voit jamais le bras découpé. C'est pesé et très bien traité de ce côté là. Dommage que l'analyse du perso soit moins fine... En effet on pénètre en lui sans trop le connaitre, Boyle filme et fait allusion à des séquences de sa vie qui nous sont inconnues et on a donc du mal à s'attacher à cet être un peu ironique et moqueur (de lui-même heureusement : scène intelligente où le perso se croit dans un show radio et fait une analyse psychologique de lui-même, critiquant par ce biais le poids des médias), limite arrogant, qui se croit au dessus de tout. Là est le point : le film est une leçon d'humilité. La nature reprend ses droits et montre qui est le boss. À retenir la dernière phrase que James Franco adresse à son rocher ; "Merci." À aucun moment il n'accable la nature, le rocher, mais il accepte sa condition, parle de destin même (dans une scène un peu ridicule qui évoque des thèmes religieux, mystiques, quasi philosophiques... on n'avait pas besoin de ça, vraiment...).

Le film sonne comme une parenthèse ; on ouvre sur un triptyque ultra nerveux sur le mouvements de masse du monde, et on referme sur le même triptyque mettant en scène le personnage qui se réadapte à son milieu. Boyle nous évite heureusement les scènes réelles de réadaptation du survivant, de glorification du héros, de campagne télé, et nous résume cela en quelques secondes. Pour finir malheureusement sur le portrait un peu nunuche du VRAI Aron Ralston, doublé par une voix off type documentaire raté... Dommage.

Malgré des effets too much, une musique pop trop présente et assez ratée (A.H. Rahman nous ressort la sauce "Slumdog mes b***** "...) à mon goût, et un traitement un peu grossier d'un personnage trop inconnu pour que l'on puisse s'y attacher, Danny Boyle livre un huit-clos éprouvant, qu'on aurait attendu plus intense, mais qui permet un traitement fin et distillé, un peu caché, de thèmes intéressants et permet à James Franco de faire un performance assez correcte (1h30 à l'écran !). Boyle n’atteint pas son niveau d’antan mais relève la barre après son film raté aux 8 oscars...

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le 2 nov. 2014

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Charles Dubois

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