Attention aux coeurs sensibles. ( et aux spoils )
12 years a slave, avant tout, est issu d'une histoire vraie, celle d'esclaves affranchis, libres, kidnappés à cause de leurs couleurs de peau, condamné à revenir sous le joug d'exploitant de coton, de cannes. Il est toujours dommage de regarder un film sans lire le livre duquel il est issu, du coup, je ne sais pas ce que vaut l'adaptation. ( amis senscritiqueurs, n'hésitez pas à m'éclairer ).
Premier film de Steve Mcqueen pour ma part, et maintenant je sais que ce n'est pas le dernier. D'abord, le casting. Fassbender, Pitt, Cumberbatch, Sarah Paulson, Paul Dano ( toujours très bon en psychopathe / dérangé ), pour les plus connus, ça donne déjà envie. Pour les inconnus au bataillon, Chiwetel Ejiofor, acteur principal, une vraie gueule, une présence de fou, et la belle Lupita Nyong'o, qui n'a pourtant pas beaucoup de film aux compteurs, mais qui mérite largement ses multiples prix d'interprétation.
C'est déjà un des gros point fort du film : la direction d'acteur. Le silence est parfois plus parlant que les mots, les regards plus que les gestes et les dires, silence et immobilité étant de mise de toute manière pour les esclaves de l'époque, vu comme de la marchandise. ( les enchevêtrements de corps, le déni de leur humanité ... une shoah avant l'heure ). La justesse de tout les acteurs force vraiment le respect, je n'imagine pas l'ambiance sur le tournage, ça devait être atroce. ( Gros moins pour Brad Pitt, totalement inutile, qui a le rôle le plus cliché du film, alors qu'il est important et aurait mérité d'être étoffé )
Ce silence est accompagné évidemment par le montage. Des plans très longs qui donnent toutes leurs forces au film : la pendaison de Solomon, et la fausse indifférence des esclaves, qui ne peuvent l'aider sous peine d'être battu. L'enterrement, ou Solomon, d'abord dégouté de chanter, chuchote, chante, avant de crier sa rage. Tout ces passages d'état d'esprit du personnage sont dans un seul et unique plan, on voit toute la progression de l'esclave d'abord abattu, puis qui se laisse gagner par les chants, avant de crier de rage.
La notion du temps, du coup, est très difficile à saisir également, c'est également un des plus gros points fort du film. On oublie, en même temps que Solomon, que le temps passe, on ne saisit plus ce qui nous rend humain, le contrôle du temps. Le montage non linéaire du film permet également cette confusion, et de se rappeler que ce film est avant tout le souvenir d'un homme, qui a réellement existé.
Les plans figuratifs de la nature semblent être les seuls moments où le spectateur n'est pas pris à parti, le seul moment ou le spectateur se sent libre, et pourtant ... Comment pensez que ces branches, qui pendent de manière sinistre, ne rappelle pas les " strange fruits ", ces corps d'esclaves pendus par dizaines ? Les longues feuilles, les lanières des fouets, et leur trace qu'ils laissent dans la peau, la peau qu'on peut arracher par lambeaux entier tellement elle est meurtrie.
Steve Mcqueen ne nous donne aucun échappatoire, au même titre que les esclaves que l'on voit tenter de vivre, qu'on voit disparaitre mystérieusement... Ce film prend toute sa force dans cette pression que le réalisateur nous impose, en tentant de ne jamais sombrer dans une morale trop simple, trop punitive et il me semble, jamais dans le cliché. ( Cumberbatch est notamment un personnage très ambivalent du film ). Le message est sans appel : l'Homme aura a payé ses actes, et il en répondra plus tard.
Après, ce film méritait-il ces multiples nominations ? Oui, totalement. Ne serait-ce que que pour les acteurs, Lupita Nyong'o et Chiwetel Ejiofor en tête, Paul Dano que j'adore, et FassBender, toujours très bon dans des rôles de sociopathe.
Bref, petite perle sans être un chef d'oeuvre.